Aurélien CANOT, Media365, publié le mardi 29 mars 2022 à 09h24
A la tête du Variétés Club de France depuis 1971, Jacques Vendroux a fêté l'année dernière les cinquante ans de ce club très spécial qui a vu passé tous les plus grands du football et vécu des moments inoubliables, toujours dans un but humanitaire. Une « grande aventure » que l'emblématique manager général du VCF, jamais à court de coup impossible, retrace dans un livre qui porte le même nom. Pour nous, l'homme de radio a même accepté de jouer les prolongations. Boîte à souvenirs en main.
Jacques Vendroux, comment est né cet ouvrage « La grande aventure du Variétés Club de France » (Marabout Editions, 29,90 €) ?
Le Variétés Club de France a cinquante ans, donc il fallait que l'on laisse quelque chose. C'est Yannick Noah qui m'a donné l'idée de faire un livre et qui m'a beaucoup aidé. Donc on a fait le résumé de ces cinquante ans. Franck Mesnel, qui était le capitaine du Racing Club de France et était allé en finale du championnat de France, avait fait un livre sur l'épopée des joueurs au nœud papillon, etc... Le livre était magnifique, il me l'a envoyé et m'a encouragé à le faire. Yannick m'a donné l'idée. Il faut le lire, c'est une belle aventure. Une aventure humaine incroyable, car le Variétés Club de France, c'est 90% d'affectif et uniquement 10% de football. Mon métier, ça a été 90% d'affectif dans mes rapports humains. La plus belle chose de la vie pour moi, c'est d'aimer les gens et d'être aimé.
Le Variétés est une institution qui a assurément marqué le football français. En quoi et de quelle manière selon vous ?
Nous avons quand même laissé près de six millions d'euros à des œuvres caritatives. On ne va pas changer la face du monde, on n'est pas les plus importants au monde, mais on a apporté notre pierre à l'édifice. Samedi dernier, par exemple, on a joué au fin fond de l'Oise pour une petite fille qui a besoin d'un fauteuil roulant. On a fait jouer le président de la République avec nous le 14 octobre, on a été reçus par Jacques Chirac, parce que l'on a apporté un peu de bonheur à des gens en difficulté. Mais je ne suis ni Mannix ni Eliott Ness ni Zorro. Et attention, on fait ça aussi pour se faire plaisir. Parce que partir au fin fond de l'Oise... Il fait froid, les douches sont froides, mais c'est un moment de bonheur fabuleux, parce que vous voyez que vous donnez un peu de bonheur aux gens. En plus, la qualité du Variétés Club de France, c'est qu'il ne peut pas nous faire perdre la tête.
Que voulez-vous dire par là ?
J'ai la chance de faire de grandes interviews, de rencontrer des personnes importantes, et le lendemain, vous allez au fin fond de l'Essonne ou de l'Ardèche où il fait froid. Donc vous ne pouvez pas perdre la tête ni devenir fou. La vraie vie vous rattrape toujours.
Au-delà de tout ça, le Variétés a marqué tous les acteurs du ballon rond quels qu'ils soient...
Oui, parce que l'on joue pour des œuvres caritatives, que l'on se marre quand on rentre dans le vestiaire, que l'on ne se prend pas au sérieux. Et quand vous avez un Platini, un Alain Giresse ou un Didier Deschamps ou un Robert Pires, ils savent que c'est pour une cause, que c'est sain et qu'il n'y a pas un plan derrière tout ça. Il y a de l'affectif ! Dans nos rapports humains avec tous les membres du club, il y a un immense affectif. Pour moi, c'est ça le plus important.
« Thierry Roland, j'y pense tous les jours »
Racontez-nous. En 1971, quand vous décidez de créer le Variétés, cela se fait comment ? Sur un coin de table ?
Oui, sur un coin de table. On joue dans des clubs civils, on était jeunes journalistes avec (Michel) Denisot, (Michel) Drucker et Michel Dhrey et on se dit que l'on ne peut plus jouer le dimanche car on travaillait beaucoup. Donc on a monté notre propre équipe de foot. Un copain d'un copain d'un copain nous a prêté un stade, qui s'appelait le stade de la Porte de la Plaine. On a joué. Après, il fallait que l'on se trouve deux ou trois copains. Moi, j'avais trouvé un commissaire de police, un pompiste. Il y avait Georges Chelon et Romuald, qui était des chanteurs connus dans les années 70, il y avait Alain Gottvallès, ancien recordman du monde du 100m nage libre. Et quelqu'un a dit - je crois que c'est Chelon - « quelle variété de métiers ! » Et on a créé le Variétés Club de France, parce que l'on était déjà fous à l'époque. Et on est toujours fou, et inconscients.
Pour vous qui êtes le neveu du Général De Gaulle, l'inauguration du stade Charles-de-Gaulle de Colombey-les-deux Eglises reste-t-il l'un de vos plus beaux souvenirs ?
C'est un moment très important, oui. Vous vous rendez compte : on a inauguré le stade Charles-de-Gaulle. Il n'y en avait pas en France. On est allés au Groënland aussi, en Mongolie, à Wallis-et-Futuna... On a aussi joué un match pour Thierry Roland, on est allés au Vatican, où on a été pardonnés de tous nos péchés par Benoît XVI. Et tout ça, mélangé d'affectif.
Et avec pour vous accompagner au fil de l'histoire des Zidane, Noah, Larqué ou autre Platini, qui laisseront une trace indélébile...
Oui, et Jean-Michel Larqué a joué son dernier match le 14 octobre avec le président de la République. Il a joué deux minutes, à 70 ans ! Il m'a fait plaisir. Il a joué le match, il a joué deux ou trois minutes, et le président lui a rendu hommage. Le Variétés, ce n'est que ça : que des coups de cœur, que des coups d'affect. Là, je suis en contact avec Alain Pompidou pour faire l'inauguration du stade Georges-Pompidou à Orvilliers. Ce sont des coups de cœur que nous essayons de médiatiser au maximum, car il faut que ça se sache.
Un coup, vous en avez réalisé un monstrueux l'année dernière avec les débuts d'Emmanuel Macron en personne sous le maillot du Variétés...
(Il coupe) C'est deux ans de boulot avec des gens très compréhensifs à l'Elysée. Je suis tombé sur des gens qui m'ont beaucoup aidé, ce n'est pas un caprice vendrouesque (sic). En plus, il se trouve que je connais bien le président, et il était complètement réceptif. Quand il avait été élu, il m'avait promis qu'il viendrait faire un match avec le Variétés. Il a tenu parole.
« Le président était fier d'avoir mis son penalty »
Comment avait-il été ce jour-là ?
Il était arrivé dans le vestiaire, on aurait dit qu'il connaissait tout le monde depuis vingt ans. Il était très à l'aise, il ne nous a pas mis mal à l'aise, Brigitte (Macron) est venue, c'était un grand moment de bonheur. En plus, c'est un bon joueur de division d'honneur, pas de problème. On n'a pas été handicapés par sa présence. Il a mis tout le monde à l'aise, tout le monde le tutoyait, l'appelait « Emmanuel ». On était surtout très contents de ce moment de partage. Et quand il a marqué le penalty, tout le monde vient le féliciter, parce que l'on sait que le président est content et qu'il est fier d'avoir mis ce penalty. Et je vais vous dire : il rejouera avec nous, président ou pas président. Il s'est éclaté.
Réalisez-vous ce que vous arrivez à faire ?
C'est un club qui sort de l'ordinaire, tout simplement. Et qui a cinquante ans. On en est à 2 400 matchs. Ça perdure. Je n'y croyais pas une seule seconde quand on a créé le Variétés. Comme je ne croyais pas une seule seconde que je serais resté 55 ans à Radio France et que je continuerais ma carrière à Europe. Ce sont des challenges auxquels on ne peut pas croire au début. En 1971, je ne peux pas croire une seule seconde que ça va durer cinquante ans. Pareil quand je rentre à Radio France en 1966 à l'ORTF : je ne peux pas croire que ça va durer 55 ans. Ni qu'Europe souhaiterait un jour que je vienne. Ce sont des rêves qui sont passés à la réalité.
Votre carrière est incroyable...
(Il se marre) Je m'amuse bien. Si je ne m'étais pas amusé, je serais parti depuis longtemps.
Pourtant, vous avez perdu du monde en route. On pense notamment au regretté Louis Nicollin...
Oui, c'est Louis Nicollin, c'est Thierry Roland, plein de gens sont partis. Il y a Léon Schwartzenberg aussi, qui nous a aussi beaucoup apporté. On pense à eux souvent. Thierry, j'y pense tous les jours, Louis et Léon Schwartzenberg aussi. Il a été notre président d'honneur pendant des années et après, il est rentré au comité directeur. Ça, ce sont des mecs bien, de belles personnes. Ce sont des gens fantastiques et je suis content d'avoir fait leur connaissance. Car des gens qui ne pensent pas qu'à leur gueule, il y en a de moins en moins. Aujourd'hui, les gens ne pensent qu'à leur gueule, qu'à leur carrière et sont courtisans.
Comment décidez-vous qu'un nouveau peut intégrer ou pas le Variétés ?
Il faut qu'il soit parrainé par trois membres du comité directeur. Mais après, vous le sentez. Là, Yohan Cabaye vient de rentrer, c'est un mec formidable. Ludovic Obraniak ne vient pas souvent car il est entraîneur du Touquet mais c'est un mec super bien aussi. Il y a rarement eu d'échec. Des regrets ? Aucun, rien. Il ne faut surtout pas regretter. S'il fallait le refaire, je referais exactement la même chose.
« Je rêve que Mbappé joue au moins un match avec nous »
Comment décidez-vous qu'il faut aligner la grosse équipe ?
C'est un peu le hasard, pour ne rien vous cacher. Sur un match particulier, on va faire un effort. Par exemple, en novembre, il y aura le centenaire de l'anniversaire de l'Aviron bayonnais football, là, on va faire une très grosse équipe autour de Didier Deschamps.
Quels joueurs rêvez-vous de voir un jour porter le maillot du Variétés ?
Olivier Giroud, (Raphaël) Varane aussi. J'aimerais bien qu'ils terminent leur carrière au Variétés Club de France. (Kylian) Mbappé aussi évidemment. Qu'il joue au moins un match avec nous, une fois dans sa vie. La vie est un rêve. En tout cas, la mienne.
Au point de réussir à intégrer votre fils Baptiste à l'aventure...
Baptiste s'occupe du Variétés Club de France avec moi, il joue. Il est journaliste à beIN Sports et Amazon. Il s'occupe beaucoup du Variétés avec moi, avec Tom Rocheteau aussi, son ami d'enfance. Je ne sais pas si on leur passera le relais, en tout cas, ils sont extrêmement présents.
Que dire de votre temps de présence dans ce cas...
Ca me prend beaucoup de temps, mais c'est une passion.
Un scoop pour les années à venir du Variétés ?
Déjà, on jouera un match le 23 mars prochain à Troyes pour la mixité dans le sport et au profit de la fondation des femmes (NDLR : Le match sera retransmis en direct sur beIN Sports et France 3, avant la diffusion d'un documentaire sur le Variétés Club de France ensuite, sur beIN Sports). J'espère que l'on va jouer sur le Charles-de-Gaulle pour les marins. J'en ai déjà parlé au président de la République déjà. Cela fait dix ans que je suis dessus (il rit). On ne sait jamais, sur un malentendu.