Paul Rouget, Media365 : publié le vendredi 28 mai 2021 à 12h44
Recordwoman des titres à Roland-Garros (7), où elle a remporté son premier et le 18e et dernier Grand Chelem de sa carrière, l'Américaine Chris Evert aura marqué le tournoi parisien, mais aussi révolutionné le tennis féminin.
Nous sommes en 1973, et Chris Evert, alors âgée de 18 ans, dispute à Roland-Garros sa première finale en Grand Chelem. Surnommée « la petite fiancée de l'Amérique », la jeune Floridienne, qui a déjà une ligne de vêtements de sport à son nom, a atteint le dernier carré à Wimbledon et à l'US Open, et elle domine facilement la Française Françoise Dürr (6-1, 6-0), gagnante de l'édition 1967, avant l'ère Open, pour se hisser en finale de ce tournoi parisien qu'elle découvre.
Face à elle, l'illustre Margaret Court, de douze ans son aînée, qui a déjà triomphé à quatre reprises dans la capitale française. Après avoir remporté le premier set au tie-break face à son expérimentée adversaire australienne, l'Américaine se détache pour mener 5-3 dans le deuxième acte. Mais alors qu'elle sert pour le match, elle va complètement s'écrouler, multipliant les fautes directes avant de s'incliner pour cette première finale en Grand Chelem (6-7[5], 7-6[6], 6-4).
Elle démocratise le revers à deux mains
"J'étais extrêmement tendue. Emotionnellement, je n'étais pas prête à gérer ce moment, se rappelait-elle pour Tennis.com l'an dernier. Margaret avait su mieux garder ses nerfs que moi. Mais je n'étais pas anéantie. J'ai réalisé que j'avais eu le match en main, mais que je n'avais pas mis assez d'intensité pour le gagner. J'ai haussé les épaules, et j'ai considéré cette première finale de Grand Chelem comme un tremplin." Et la suite lui a donné raison. Son mental deviendra d'ailleurs l'une de ses grandes forces. Tout comme son jeu de fond court, alors que la mode était au service-volée, et son revers à deux mains, qu'elle fut l'une des premières à démocratiser.
Et si elle a de nouveau disputé deux finales de Majeur sans parvenir à s'imposer, à Wimbledon contre Billie Jean King et à l'Open d'Australie face à Evonne Goolangong, Chris Evert finit par remporter son premier tournoi du Grand Chelem pour son retour à Roland-Garros en 1974. En l'absence de plusieurs stars engagées dans la ligue World Team Tennis, elle domine aisément en finale sa partenaire de double, la Soviétique Olga Morozova (6-1, 6-2).
Premier duel à Roland contre Navratilova
Le premier des 18 titres du Grand Chelem de « Chrissy », sacrée à Wimbledon dans la foulée face à la même adversaire. Un an plus tard, c'est celle qui va devenir sa plus grande rivale qu'elle affronte en finale de Roland : Martina Navratilova. Ce 13e des 80 duels entre les deux joueuses va encore tourner à l'avantage de Chris Evert (2-6, 6-2, 6-1). Mais il faudra ensuite attendre près de dix années pour les retrouver face à face à Paris.
En 1984, la Tchèque, qui remportera aussi 18 Majeurs, en compte huit, dont cinq gagnés, pour un perdu, face à l'Américaine, à Wimbledon (X3), l'US Open et en Australie. L'Américaine, qui en a alors 15 à son actif, s'inclinera de nouveau face à sa rivale (6-3, 6-1). Entre ces deux finales sur l'ocre parisien, et après avoir manqué les éditions 1976, 1977 et 1978 pour cause d'engagement avec la World Team Tennis, elle avait facilement triomphé dans la capitale en 1979, 1980 et 1983, face à Wendy Turnbull (6-2, 6-0), Virginia Ruzici (6-0, 6-3) et Mima Jausovec (6-1, 6-2), après deux défaites consécutives dans le dernier carré.
Des records qui tiennent toujours
Ses sixième et septième titres à Roland, un record dans le tournoi féminin, elle les remportera en 1985 et en 1986, contre sa rivale Navratilova. Celle de 1985 restera dans l'histoire comme leur plus beau duel, avec un succès en trois manches accrochées d'Evert (6-3, 6-7[4], 7-5). Elle ne partait pourtant pas favorite, avec 15 défaites lors de ses 16 derniers matchs face à la Tchèque. Mais devant un public conquis, elle allait donc réussir à s'imposer après une rencontre particulièrement disputée.
Un an plus tard, elle s'adjugeait son 7e titre parisien, et le 18e et dernier Grand Chelem de sa riche carrière. Et ce après un nouveau match en trois manches face à Martina Navratilova, mais beaucoup moins disputé (2-6, 6-3, 6-3). "J'étais surprise de pouvoir gagner deux fois de suite comme ça en finale d'un Grand Chelem contre Martina. Le match était de bien meilleure qualité, bien plus propre. Et le fait de l'emporter m'a fait réaliser que j'étais encore là", reconnaîtra-t-elle ensuite.
Mais celle qui aura fini numéro un mondiale à cinq reprises (1975, 1976, 1977, 1980 et 1981) échouera en demi-finale de l'édition suivante, toujours contre Navratilova, battue en finale par Steffi Graff, puis au troisième tour pour sa dernière participation à Paris, en 1988, face à Arantxa Sanchez. Chris Evert prendra sa retraite en 1989, avec le record de victoires à Roland et un autre tout aussi impressionnant, puisqu'elle aura réussi à remporter au moins un Grand Chelem par an entre 1974 et 1986...