Thomas Siniecki, Media365, publié le vendredi 02 octobre 2020 à 20h11
Caroline Garcia est sortie gagnante d'une lutte intense contre Elise Mertens, vendredi au troisième tour de Roland-Garros (1-6, 6-4, 7-5). La Française revient sur son match, et aussi sur ce contexte qui ne lui réussit pas si mal...
Caroline, ce n'était pas "Flying Caro" mais "Fighting Caro" ! Vous paraissiez très vite dans le brouillard, vous vous êtes accrochée. Ça doit être un super sentiment de voir que votre volonté prend le dessus.
Le premier set était compliqué, elle a joué très juste. C'était très précis à chaque fois, c'était difficile d'anticiper. Je n'étais pas trop dedans physiquement. Mais après, j'avais l'impression qu'elle pouvait me laisser des opportunités et que je pouvais faire mieux. En tout cas, j'avais envie de me battre jusqu'au bout avec les armes du jour, et peu à peu mon niveau de jeu s'est amélioré. J'arrivais à mieux lire tactiquement, c'était plus juste. Parfois j'ai réussi à renverser la tendance, à me concentrer un point après l'autre, à faire de mieux en mieux, être plus agressive, profiter de ce moment et me battre jusqu'au bout. Parfois, les scénarios changent vite.
Vous étiez arrivée en quarts de finale en 2017. A quel niveau êtes-vous désormais ?
C'est difficile à dire d'une année à l'autre, je crois avoir beaucoup appris dans l'intervalle. Par ailleurs, quand on est plus jeune, on réfléchit moins. On apprend. Les deux situations ont leurs avantages. J'ai joué du bon tennis à Roland-Garros. Le scénario n'est pas toujours le meilleur, mais je me bats jusqu'à la fin, étape par étape. Je suis en deuxième semaine après trois bons matchs, je ne sais pas si je suis à mon niveau de l'époque, meilleur ou moins bon... Je suis la Caroline Garcia de 2020.
Qu'est-ce qui vous passe par la tête lorsque vous ratez les deux premières balles de match ? Comment revenez-vous à ce moment-là ?
J'aurais pu aborder mieux certaines balles de match, oui... Je n'ai pas assez forcé, il y'en a d'autres où elle a foncé. Il faut rester dans le présent. Je me suis dit que j'allais faire mieux à la prochaine. Je me suis battue point après point. A 5-4, 40-15, j'étais stressée. Soit vous attaquez trop, soit vous n'attaquez pas assez. Comme c'est une bonne joueuse, si je n'attaque pas assez, elle va y arriver. A 6-5, j'étais moins stressée, je me suis concentrée sur chaque point en me demandant ce que je pouvais faire et ce que j'aimais faire, en me disant qu'elle était aussi sous pression. Ce n'était pas la peine de tenter des coups trop risqués. C'est une question d'équilibre. Parfois on n'y arrive, d'autres pas. Je vais voir ce que je vais améliorer.
"Cette année, on m'a moins pris la tête avec Roland-Garros"
Le Central ne vous plaisait pas jusque-là. On a l'impression que même avec la jauge du public, c'est presque juste ce qu'il vous faut, un peu d'intimité...
Quand je suis rentré sur le Central, j'ai tapé dessus jeudi avant le tournoi, j'avais l'impression de rentrer sur un court que je n'avais jamais vu, tellement il est différent. En plus, le toit était fermé. Les années précédentes, il y avait de mauvais souvenirs qui revenaient de temps en temps. J'appréhendais souvent, même si j'avais fait beaucoup de travail dessus. Mais là, il a tellement évolué que je peux me créer de nouveaux souvenirs. En plus, les jauges donnent effectivement un feeling différent. Du coup, je suis là et je profite de ces expériences que j'ai. En plus, c'est une chance de pouvoir jouer sur un court couvert. Tu n'as pas l'attente, tu sais que tu vas jouer, c'est super important. Je suis contente, à vrai dire, de jouer sur le Central. C'est une chance.
A quel point la magie de Roland-Garros opère-t-elle en automne ?
C'est difficile à dire, c'est différent. On a moins l'impression de sentir Roland-Garros, en tout cas, moi on m'a moins pris la tête depuis deux mois en me disant : "Tu as Roland-Garros, comment tu te sens ?" En temps normal, ça commence trois mois avant. Cette année, ça ne s'est pas passé et ça ne m'a pas manqué. Tu as moins cette pression. Ça reste un tournoi du Grand Chelem, c'est Roland-Garros. On a la chance de pouvoir y jouer, alors que l'on ne savait pas ce qui allait se passer. J'ai envie de profiter au maximum. Le public est peu nombreux mais à 100 % derrière moi, encore plus chaud et partisan que les années précédentes. Ce n'est que du bonheur. Je suis pleine de gratitude.
Vous nous expliquiez avoir travaillé sur vos mauvais souvenirs, pouvez-vous nous en dire plus ? Qu'avez-vous fait pour revenir avec une fraîcheur mentale nouvelle ?
C'est un peu un travail de tous les jours. On sait que le mental ou la tête, peu importe les mots que l'on veut employer, c'est toujours important, notamment pour accepter des choses qui ne se passent pas bien. Des défaites, des points perdus, une balle de match ratée, ça ne veut pas dire que l'on a perdu le match, on peut continuer. Avec le confinement, on a eu plus de temps, j'étais moins stressée, ça m'a permis d'apprendre des choses sur moi-même et de travailler tranquillement. Et de ne pas changer ça parce qu'il y a un tournoi deux semaines plus tard... J'ai pu travailler certaines choses, être plus calme et positive, voir les choses différemment. Ça commence à payer, ça peut encore s'améliorer et ça continuera à payer.