Thomas Siniecki, Media365, publié le jeudi 01 octobre 2020 à 22h49
Fiona Ferro a impressionné jeudi, pour son deuxième tour de Roland-Garros devant Elena Rybakina (6-3, 4-6, 6-2). Après une blessure aux côtes, elle continue de surfer sur une impressionnante vague de succès depuis février.
Fiona, gagner un match comme ça face à la 18eme mondiale, sur ce Central qui fait rêver tous les Français, il doit y avoir un sentiment de satisfaction absolue...
Ce n'est pas seulement de gagner, mais déjà quand j'ai appris que j'allais jouer sur le Central, j'étais super contente, même si je n'ai pas eu l'occasion de taper dessus. Je n'étais pas du tout inquiète, juste contente de pouvoir jouer sur ce court magnifique. Au premier set, j'ai vraiment kiffé. Au deuxième, j'ai eu un petit moment où j'ai perdu mon état d'esprit positif, je n'ai pas aimé ce que je ressentais. Mais j'ai réussi à le retrouver au troisième. Le public, ma famille et mon coach m'ont bien aidé, tout le monde m'a poussé et m'a donné des énergies positives sur ce troisième set. C'était génial. Mes parents et mes trois frères étaient là, au premier tour je n'avais pas d'invitation car je n'étais pas sur un des trois courts principaux.
Comment classez-vous ce succès dans votre jeune panthéon, déjà un peu garni, et les émotions qui vont avec ?
C'est ma plus belle victoire, pas forcément en termes de niveau de jeu, mais en termes d'émotions. Des moments comme ça, c'est vraiment pour ça que je m'entraîne. Même si le Central n'était pas plein, il y avait quand même un peu de public. C'est dans le top des émotions de ma carrière. Et il y a deux ou trois semaines, je n'étais sûre de rien, donc je suis très contente de pouvoir jouer.
Vous êtes plutôt discrète. Là, vous faites une petite entrée dans la lumière. On ne veut pas du tout vous faire peur, mais est-ce que vous y pensez ?
Pas trop. J'aime bien cette discrétion, parce que j'ai quand même envie de rester sur des choses simples, c'est-à-dire le tennis et le jeu. J'essaie de ne pas trop en rajouter à côté de ça. Mais sinon, quand j'entends les gens qui scandent mon nom et qui me soutiennent, évidemment j'adore ça aussi. Le principal, c'est de rester sur l'essentiel, sur le jeu.
"Je ne sais pas trop comment je vais gérer"
Sur la gestion des émotions, vous avez parlé de ce petit trou au deuxième set. C'est une vraie victoire, vous ne vous êtes pas laissée démontrer sur le Central de Roland-Garros face à une excellente joueuse. Vous n'avez quand même pas montré grand-chose comme frustration, est-ce que ce travail est très important dans votre progression ?
C'est sûr. Auparavant, je serais peut-être entrée sur le court en me disant que je n'avais jamais joué sur le Central, j'aurais été plus tendue pendant plus longtemps. Là, ça a duré deux jeux et j'ai réussi à mettre en place mon tennis. C'est une vraie victoire, oui, ça va me faire du bien pour la suite. La prochaine fois que je vais être amenée à jouer sur de grands courts, je me souviendrai que j'ai réussi à le faire, donc qu'il n'y a pas de raison de ne pas y arriver une deuxième fois.
Le tennis féminin français a souvent été en retrait par rapport au tennis masculin. Là, Clara Burel s'invite au troisième tour avec Caroline Garcia et vous, est-ce que vous y voyez le signe d'une sacrée ressource ?
Il y a quelques bonnes joueuses qui arrivent, avec Burel mais aussi Diane Parry et Elsa Jacquemot. Elles jouent très bien toutes les trois. C'est super que l'on soit trois au troisième tour. Si on se met à être nombreuses à bien jouer, ça peut créer une émulation, ça peut nous pousser l'une l'autre. Je souhaite qu'elles aillent le plus loin possible. Je pense que ça ne peut que nous tirer vers le haut.
Vous êtes la seule avec Novak Djokovic, Simona Halep et Naomi Osaka à avoir gagné tous vos matchs depuis la sortie du confinement. Les attentes commencent donc à monter fortement, surtout avec ce contexte français où ça ne va pas très bien pour les garçons. On a l'impression que ça ne vous perturbe pas du tout, est-ce qu'on se trompe ? Est-ce que ça joue un peu dans votre tête, ou ça ne vous atteint pas ?
Pour le moment, ces derniers mois et ces dernières années, il n'y a pas vraiment eu énormément d'attentes pour moi. C'est quelque chose qui va être un peu nouveau. Je ne sais pas trop comment je vais le gérer. Je vais essayer de faire de mon mieux. Je pense que l'important c'est de rester sur l'essentiel, comme j'ai dit, de rester sur le jeu et d'essayer de faire de mon mieux à chaque fois. Quant à ma série de victoires, je n'avais pas joué lors des six ou sept dernières semaines. Le sentiment est donc un peu bizarre, parce que je suis sur une série de victoires, et en même temps je reviens d'une blessure. Dans les moments où c'était un peu chaud, j'essayais de m'en rappeler, de me dire que si je jouais de la bonne façon, j'avais toutes les armes pour la dominer. A certains moments, c'était un peu une lutte contre moi-même. J'avais besoin de me persuader de ça.
Que vous a dit Emmanuel Planque après le match ? Vous préparez ça ensemble, ou chacun de votre côté et ensuite vous partagez les informations ?
Il m'a dit qu'il était très content, que j'avais fait preuve de beaucoup de courage aujourd'hui. On n'a pas eu le temps de discuter beaucoup. Il regarde beaucoup de vidéos des joueuses que j'affronte. Comme il était chez les garçons avant, il ne les connaît pas forcément toutes. Il regarde beaucoup de vidéos et après on prépare le match ensemble, on discute de ce que je connais et de ce qu'il a vu.