Clément Pédron, Media365, publié le lundi 28 décembre 2020 à 12h17
Dans une interview accordée ce lundi à So Foot, Frédéric Thiriez (68 ans) est revenu sur sa décision de se porter candidat à la présidence de la FFF. Il en a également profité pour évoquer d'anciens dossiers de la LFP, reconnaître quelques erreurs avec le souci de redorer son image d'homme rigide qui lui colle à la peau.
Après 14 ans à la présidence de la Ligue qu'il a quittée en 2016 en démissionnant, Frédéric Thiriez (68 ans) a laissé passer quatre longues années avant de réapparaître dans le paysage du ballon rond français. Cette fois, l'avocat revient dans la peau d'un candidat à la Fédération Française de Football (FFF) et avec des préoccupations différentes, essentiellement basées sur le foot amateur, aujourd'hui à l'arrêt total. Surtout, l'homme tente de dépoussiérer une image un peu terne. Frédéric Thiriez, le boss de la discipline professionnelle jadis, a eu une révélation cette fois pour sa petite soeur. « Le déclic, c'est le jour où l'on a arrêté les championnats nationaux en France, se souvient le natif de Neuilly-sur-Seine. J'étais très étonné que l'on prenne une décision aussi précipitée alors que tous nos voisins européens continuaient. En France, on a un peu tendance à croire que l'on a raison contre tout le monde. Ce n'est pas du tout ma philosophie, il faut que la France ose regarder ce qui se fait ailleurs. Je me suis donc dit qu'il y avait quelque chose qui ne fonctionnait pas dans nos instances, que ce soit à la Ligue ou à la Fédération. Il fallait que je me réinvestisse. »
« 2 millions de licenciés, c'est indigne ! »
Avec le contexte sanitaire, le foot amateur est actuellement en grande difficulté et c'est le coeur du projet de Frédéric Thiriez, qui donnera sa liste le 13 février prochain : « Aujourd'hui, il y a une baisse des licenciés qui atteint parfois 20% dans certains clubs et donc une baisse des recettes. Il y a également une chute des sponsors avec la crise économique, ils ne veulent plus mettre d'argent dans des clubs amateurs, même réputés. On peut aussi parler des bénévoles : ils sont 400 000, ils font tourner la machine et ils sont découragés. Dans mon projet fédéral, j'imagine deux choses : un plan de sauvetage du foot amateur, puis un plan très ambitieux de développement de la pratique qui se situe à un niveau indécent aujourd'hui en France. Deux millions de licenciés, c'est indigne de notre pays. »
En parallèle, le candidat travaille à l'évolution du nombre de licenciés et également du développement du foot féminin. Il vise 4 millions de pratiquants d'ici à dix ans : « Je pense que c'est un objectif atteignable [...]. Et parmi ces 4 millions de licenciés, je mentionne un million de filles. Pourquoi n'avons-nous que 200 000 licenciées chez les femmes ? Ce n'est pas normal. Il y en a 700 000 en Allemagne, 2 700 000 aux USA. On est un peu machistes en France, mais quand même. Il y a plein de filles qui aimeraient jouer au football, mais les clubs ne peuvent pas les accueillir. »
« Heureusement, on apprend de ses erreurs »
Fatigué de l'opposition incessante entre football pro et amateur, Frédéric Thiriez veut s'atteler à plus de proximité, d'entraide entre les deux « mondes ». « Nous ne pouvons pas vivre les uns sans les autres. Le foot appartient à tout le monde, je tenais le même discours lorsque j'étais président de la LFP, répète inlassablement le Français. Pour le reste, je compte mener une campagne de terrain auprès du foot amateur. Les dirigeants sont souvent contents de me rencontrer, ils me disent que je ne suis pas comme ils l'imaginent. Je pense que l'image dont vous parlez va changer parce qu'elle ne correspond pas à la réalité. »
Désireux de redorer son blason, de dépeindre une réputation d'homme sévère, pas le plus grand défenseur des supporters, l'avocat assure : il y a eu du positif mais également du négatif dans ses interventions et il n'hésite pas à faire un mea culpa sur certains dossiers : « Heureusement, on apprend de ses erreurs. J'en ai fait à la Ligue, je peux même vous en donner une : quand je ne suis pas descendu sur le terrain lors de Bastia-PSG. Je regrette cette erreur. On m'avait dit que je ne devais pas y aller à cause des risques d'incidents... Mais même si j'avais eu le droit à des cris, j'aurais dû descendre. » En revanche, concernant le club de Luzenac (empêché de monter en Ligue 2), Frédéric Thiriez n'en démord pas. « Je comprends très bien la déception, voire la colère des joueurs et dirigeants de Luzenac qui pensaient avoir gagné le droit de jouer en Ligue 2, convient Thiriez. Le problème, c'est que le foot est un univers gouverné par des règles. Or, il y a des règles pour l'accession au monde du foot professionnel : financières (DNCG), sociales et techniques puisqu'il faut avoir un stade. Il se trouve que Luzenac ne répondait pas à ces conditions techniques indispensables malgré les nombreuses relances des services de la Ligue. Mon rôle, c'était de faire respecter ces règles »
Une rémunération pour les dirigeants ?
Avec sa liste dévoilée bientôt mais dont on connaît déjà un nom (Basile Boli), Frédéric Thiriez admet une certaine volonté de décentraliser la gouvernance de la FFF et de s'appuyer sur un collège d'internationaux pour prendre des décisions. « Je pense qu'on ne gouverne plus de manière verticale, de Paris aux autres régions, reconnaît l'avocat. Je suis pour décentraliser la gouvernance, en s'appuyant davantage sur les ligues régionales et les districts. Je suis pour professionnaliser davantage l'appareil fédéral en permettant carrément la rémunération des dirigeants, y compris au niveau des districts, ce qui aujourd'hui n'est pas le cas. Je suis pour associer les anciens internationaux aux décisions. Ils nous ont fait rêver et ils ont des conseils à donner : je veux créer un comité des internationaux qui sera auprès du comité exécutif et qui donnera son avis. Il faut une Fédération plus participative, plus représentative de la diversité et du monde du football. »