Coupe du Monde 1970 : Le match du siècle pour l'Italie face à l'Allemagne de l'Ouest

Emmanuel LANGELLIER, Media365 : publié le jeudi 14 mai 2020 à 14h01

La demi-finale de la Coupe du Monde 1970 entre l'Italie et la RFA était le théâtre d'une fabuleuse rencontre. Un match surnommé le « match du siècle » qui avait offert une prolongation de folie (4-3, dont cinq buts après la 90eme minute). Retour sur ce moment de légende.

Pour certains, c'est le plus grand match de l'histoire de la Coupe du Monde. N'en déplaise aux Français et autres amoureux du foot qui lui préfèrent le France-RFA de 1982 ou l'opposition entre Tricolores et Brésiliens du Mondial 1986. Le bras en écharpe de Franz Beckenbauer, les buts de Müller, Riva et Rivera, vous vous souvenez ? Cet Italie-RFA de 1970 a été surnommé le « match du siècle » et est entré dans l'histoire car il a offert une prolongation inouïe et des éléments en pagaille propres à en faire une rencontre d'exception. Comme les deux autres joutes précédemment citées, ce n'était pas une finale mais on sait bien que les finales sont souvent décevantes (sauf cette année-là où le Brésil-Italie est superbe...).

Non, cette rencontre unique se déroule dans le cadre d'une demi-finale. La deuxième de la spectaculaire Coupe du Monde 1970. Traversée par la feinte de corps géniale réalisée par Pelé, la première, au goût de finale, s'est conclue par la victoire du Brésil aux dépens de l'Uruguay (3-1). L'autre oppose l'Italie de Giacinto Facchetti, Gianni Rivera, alors tenant du titre du Ballon d'Or France Football, et Luigi Riva à l'Allemagne de l'Ouest emmenée par Franz Beckenbauer et Gerd Müller.

Une demi-finale dans la légende

Ce 17 juin 1970, devant plus de 100 000 spectateurs enivrés et massés dans le Stade Aztèque de Mexico, Italiens et Allemands vont offrir un récital qui, cinquante ans plus tard, reste encore gravé dans les mémoires. Dans ce premier Mondial télévisé en couleurs où les cartons jaunes et rouges sont utilisés pour la première fois, l'Italie s'est extirpée du groupe II (1-0 contre la Suède, 0-0 contre l'Uruguay et Israël) avant d'écraser le Mexique (4-1) en quarts. Victorieuse de l'Angleterre après prolongation (3-2), la RFA a, elle, débuté par trois succès (2-1 face au Maroc, 5-2 contre la Bulgarie et 3-1 infligé au Pérou) dans le groupe IV.

Boninsegna dès la 8ème minute

Le temps réglementaire n'est pourtant pas spécialement emballant et on est très loin d'imaginer une suite renversante. La partie est tactique, hachée. Roberto Boninsegna ouvre rapidement la marque dès la 8eme minute après un une-deux de haut vol avec Riva. La puissante frappe du pied gauche des 20 mètres de l'attaquant de l'Inter Milan ne laisse aucune chance à Sepp Maier, battu sur sa droite. Puis, dans le four mexicain où il règne une chaleur écrasante, la RFA tente de recoller et serre le jeu. Le temps s'étire, la Nazionale conserve son précieux avantage et voit se profiler une nouvelle finale, deux ans après avoir remporté l'Euro 68.

Schnellinger marque à la 90eme, une prolongation dingo entre les deux équipes

Müller, qui aurait perdu sept kilos au cours du match, est à la ramasse. Enrico Albertosi commet deux bévues incroyables, dont une qu'il sauve in extremis d'un tacle à la limite de la faute. Le soleil de plomb de Mexico tape sur les systèmes. On ne semble pas vraiment assister à une demie de Coupe du Monde. Mais Karl-Heinz Schnellinger, seul face à Enrico Albertosi sur un centre issu du flanc gauche, égalise du plat du pied droit à la 90eme (1-1) ! L'Italie est plantée par un défenseur qui évolue sur son sol durant toute l'année, dans les rangs de l'AC Milan. Tout est relancé et les débats vont donc se prolonger avec des organismes bien entamés.

Dans la prolongation, cette demie va devenir dingo. La tactique, c'est fini. Adios la rigueur. Auteur jusque-là de sept buts durant la compétition mais muet depuis le coup d'envoi, Müller retrouve son sens du but. A la 94eme, le « Bomber » profite d'une étonnante mésentente italienne et surgit pour donner l'avantage à la Nationalmannschaft ! Loin de paniquer, l'Italie parvient néanmoins à revenir grâce à Tarcisio Burgnich d'un tir imparable du gauche (98eme). 2-2 et on est encore loin d'avoir tout vu !

Müller signe le 3-3, Beckenbauer se casse la clavicule mais reste sur le terrain

La Nazionale reprend les devants sur une superbe action signée Riva. Le buteur de Cagliari enchaîne contrôle magnifique à l'entrée de la surface de réparation allemande, crochet et frappe croisée gagnante du gauche à ras de terre (104eme, 3-2). Impensable, les Transalpins mènent de nouveau en ayant fait la différence en l'espace de six minutes. Pourtant, ce match fou rebondit une nouvelle fois... six minutes plus tard !

Müller rode encore et trompe Albertosi d'une tête saignante à bout portant, 3-3 à la 110eme ! La RFA a refait son retard mais évolue avec un élément fortement diminué : son Kaiser Beckenbauer. Suite à un choc avec un adversaire, le défenseur du Bayern Munich s'est cassé la clavicule. Toutefois, héroïque et refusant de s'arrêter, il est resté sur le terrain, Helmut Schön, le sélectionneur ouest-allemand ayant déjà procédé à ses deux changements autorisés à l'époque. Bras contre la poitrine, Kaiser Franz impose une image invraisemblable à la TV, un cas impossible au XXIeme siècle.

Rivera envoie l'Italie en finale de la Coupe du Monde de foot 1970

Beckenbauer va, malheureusement pour la Mannschaft, porter une part de responsabilité sur la suite de cette rocambolesque demi-finale. Et sur l'élimination allemande... Alors que la télévision diffuse le ralenti du dernier but de Müller, Rivera reprend un centre en retrait idéal de Boninsegna, lancé sur le flanc gauche par Facchetti. Esseulé au point de penalty, l'élégant meneur de jeu du Milan place un plat du pied droit providentiel. Maier ne peut rien faire sur sa droite (4-3, 111eme minute). La RFA ne reviendra pas. L'Italie vient de gagner le droit d'affronter trois jours plus tard le Brésil de Pelé.

Malheureusement pour les italiens, l'issue de la finale sera bien différente de celle de la demi-finale épique face à l'Allemagne de l'Ouest. Le Brésil ouvre le score dès la 18ème minute grâce à une tête de Pelé suite à un centre de Rivelino. La Squadra Azzura n'est pas du genre à abandonner et parvient à égaliser avant la mi-temps par l'intermédiaire de Boninsegna, encore lui. Une brève accalmie. Le Brésil, fidèle à ses principes de jeu, va revenir des vestiaires avec de meilleures intentions. Gerson redonne d'abord l'avantage aux siens à la 66ème minute. Les italiens ne parviendront jamais à recoller au score. Jairzinho, puis Carlos Alberto, sur deux passes décisives du roi Pelé, viendront donner plus d'ampleur au score. 4-1, score final. La Seleçao remporte sa troisième Coupe du Monde, deux autres suivront. Pour les italiens, il faudra patienter 12 ans avant d'accrocher, eux aussi, une troisième Coupe du Monde.

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