Maradona : Un rapport avorté avec la France

Maradona : Un rapport avorté avec la France©Media365

Clément Pédron, Media365, publié le mercredi 25 novembre 2020 à 21h09

À la lecture de l'immense carrière de Diego Maradona, décédé d'une crise cardiaque ce mercredi, il apparaît un point commun entre sa vie de joueur et d'entraîneur : la France. Par deux fois, l'Argentin a failli rejoindre l'Hexagone, d'abord à l'OM en 1989 et plus récemment, à Montpellier en 2013. Comme tout le temps, rien n'est jamais simple avec El Pibe del Oro.

 

Il était l'incarnation même de ce sport. C'est sans doute lui qui en a dessiné les contours, établit les règles et l'un des tous premiers à faire du football, un fantasme. Rien qu'à le voir jouer, il se dégageait quelque chose qui relevait de l'ineffable, quoi qu'on en dise ou qu'on en pense. Diego Maradona s'est éteint ce mercredi 25 novembre à la suite d'un arrêt cardiaque chez lui en Argentine. Et au regard de son immense carrière où le joueur et l'entraîneur se sont côtoyés, il apparaît un souvenir commun, une tentative similaire : celle de rejoindre la France. Il faut remonter à un matin de printemps 1989 où le n°10 légendaire évoluait à ce moment à Naples. Michel Hidalgo, le directeur sportif de l'Olympique de Marseille échange avec le président Bernard Tapie « C'est simple, on cherchait LE joueur qui allait faire passer un palier à l'OM, se souvenait l'ancien sélectionneur de l'équipe de France - décédé en mars 2020 - pour So Foot en 2013. Et à cette époque, LE joueur, c'est Maradona. On savait qu'il n'était plus heureux à 100% avec son club, des informations avaient filtré. Tapie est parti au quart de tour, m'a expliqué que ce n'était pas une question d'argent et m'a proposé de prendre son avion privé pour aller rencontrer Maradona chez lui à Naples. Sur un avion de ligne, on se serait fait repérer tout de suite. »

« Je lui ai parlé de la maison à Cassis, de la mer... »

Après son arrivée dans le sud de l'Italie, il prend la direction de la maison du milieu offensif : « Chez Maradona, c'était une maison pas mal, mais pas la maison qu'on imaginait, avouait Michel Hidalgo. Il y avait quand même deux Ferrari, je me souviens. » Une fois certaines obligations avec les médias argentins accomplies, El Pibe del Oro décide d'emmener manger le directeur sportif ainsi que trois amis. La mission de Michel Hidalgo est simple, convaincre l'Argentin de signer à l'OM : « Je lui ai dit qu'on l'attendait à Marseille, qu'il aurait une villa magnifique à Cassis, en bord de mer, avec une piscine et un grand jardin. J'avais appris par son agent qu'il ne supportait plus sa maison de Naples, dans laquelle il se sentait un peu enfermé. Ce soir-là, Maradona, dans sa tête, il était à Marseille. Mais il savait que ça serait très difficile. Il m'a dit qu'il faudrait tordre le coup au président du Napoli, Ferlaino, en faisant le geste avec sa main. Puis on s'est quittés. À la sortie du restaurant, au moment de me dire au revoir, Maradona m'a reparlé de la maison à Cassis, c'est quelque chose qui l'intéressait beaucoup. »

Lorsque Michel Hidalgo rentre à Marseille, la rumeur, qui n'en est plus une, prend de l'épaisseur. Tout le monde se met à rêver du n°10 avec la tenue de l'OM mais, comme prévu, l'opération est mal embarquée. Malgré une réunion organisée dans un hôtel à Milan entre Naples, Marseille et Maradona, le dossier patine : « On a su très vite que ça ne serait pas possible, expliquait de son côté Ferlaino. Je crois que Bernard Tapie a fait traîner un peu l'histoire dans les médias, parce que ça faisait parler du club en Europe et que c'était bon stratégiquement, d'être un club qui peut se payer Maradona. » Les positions restent figées et Maradona abandonnent son envie de rejoindre la France. Tapie réessaiera en 1992 mais cette fois, c'est le joueur qui est « moins chaud».

Maradona, entraîneur à Montpellier ?

Un peu plus de vingt ans après, le 3 mars 2013, une bombe médiatique provenant du Midi Libre frappe à la porte des récents champions de France montpelliérains. Alors que le club s'apprête à perdre son entraîneur, René Girard, le président Nicollin frappe par voie de presse : « Il (Girard) a dégainé le premier, il ne reste pas. Je lui souhaite d'aller au Real Madrid. On va trouver un autre bon entraîneur. Oui, mais qui ? Zidane ? Non, pas Zidane. Mais Maradona, ça aurait de la gueule à La Mosson, non ? » Jusque-là, rien de surprenant quand on connaît le personnage héraultais. Sauf que ce dernier remet une couche le lendemain, à la radio cette fois : « Rien que pour emmerder le PSG, j'ai envie de prendre Maradona ». Et alors que n'était que chimère, voilà qu'une nouvelle sortie médiatique donne de l'épaisseur à ce dossier. Youssef Haijoub, directeur de l'agence de marketing sportif SGM Agency et détenteur des droits d'image de la star en France, balance à l'AFP le 5 mars : « Ce matin, Maradona nous a dit qu'il était d'accord pour discuter avec Montpellier d'une éventuelle proposition. Nous allons indiquer au club par fax [...] qu'il est OK pour entamer des négociations. » Rien que ça. Contacté par RMC, Loulou Nicollin confirme l'information : « Je ne dis jamais de bêtise. Ça fait un mois que je sais qu'il est intéressé de venir en France. J'ai reçu un fax. »

Malgré son scepticisme quant au futur salaire demandé par l'Argentin, le dirigeant ne ferme pas la porte : « À moins qu'il vienne comme Beckham et qu'il reverse l'intégralité de son salaire... S'il demande le minimum d'un entraîneur de L1, à savoir 30.000 euros, je signe demain matin. Même s'il veut une villa et une voiture avec chauffeur, il n'y a aucun problème. Un entraîneur à 100.000 euros ? Si je fais ça, je ne m'appellerais plus Nicollin. » Quelques jours plus tard et avec l'engouement médiatique dû à l'arrivée du meilleur joueur du monde, Nicollin jette l'éponge, lassé par la surenchère des agents et la difficulté de la tâche dans L'Équipe : « Maradona ne viendra pas. Vous voulez que je vous dise ? J'en ai plein le cul. C'est impossible de discuter avec un manager. Il en a sept, et maintenant un huitième. C'est invivable. (...) Là, avec Maradona, c'est un bordel sans nom. » Peut-être auront-ils maintenant l'occasion de se rabibocher, qui sait...

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