Rédaction Media365, publié le vendredi 20 mai 2022 à 14h21
Pour son tout dernier Roland-Garros, le tirage a réservé à Gilles Simon (37 ans) le redoutable Espagnol Pablo Carreño Busta, 17eme mondial. En attendant de savoir s'il parviendra à créer l'exploit, le Niçois, qui prendra sa retraite à la fin de la saison, s'est déjà penché ce vendredi en ouverture du média day sur ce qui l'attend une fois sa révérence tirée. L'occasion également pour "Gilou" de revenir sur sa décision d'arrêter et de se replonger dans sa longue carrière. Avec toujours autant de discernement.
Gilles Simon, comment abordez-vous votre dernier Roland-Garros ?
Je me sens bien, c'est une décision logique pour moi de m'arrêter à la fin de l'année. J'ai la chance de pouvoir faire un dernier Roland, je vais essayer d'en profiter au maximum. Pour un dernier Roland, j'ai un tirage pas évident (il rit), mais, encore une fois, je veux juste faire le max, et essayer vraiment d'en profiter.
Qu'est-ce qui vous a poussé à prendre cette décision ?
C'est un peu tout. C'est le niveau. Le niveau baisse assez constamment depuis quelques années. Et un moment, ça devient très difficile. J'ai surtout l'impression de courir après le temps en fait, de ne jamais être vraiment prêt. Tout prend trop de temps, tout devient difficile. Il n'y a pas assez de bonnes semaines et les périodes où ça va ne sont pas assez longues. C'est un sport qui est très physique, parce qu'on a un classement sur un an. Il faut jouer chaque semaine, il faut être régulier chaque semaine, et ce n'est plus possible de le faire. Fatalement, le classement chute aussi, et ça devient beaucoup d'efforts pour trop peu de temps ou trop peu de matchs agréables à jouer finalement, avec toutes les conséquences logiques qui en découlent. La dernière conséquence logique, c'est de s'arrêter à la fin de l'année.
Y a-t-il un côté nostalgique à venir comme c'est le cas pour vous cette année venir disputer ce tournoi de Roland-Garros pour la dernière fois ?
Honnêtement, quand je l'ai annoncé, je m'attendais à ce que cela me fasse quelque chose. La décision, ça fait un moment que je l'ai et que je me dis que ça va se terminer comme ça. Mais à un moment, quand on la rend officielle, c'est fait. Et dans mon cas, il n'y a pas de retour en arrière possible. On ne reviendra pas dessus, et je m'attendais à plus de choses à l'intérieur, on va dire. Alors que quand j'ai annoncé, il ne s'est rien passé, et je me suis dit que j'avais pris la bonne décision, que c'était vraiment logique et j'étais cent pour cent à l'aise avec, sans regret, ni pincement au cœur ni de nostalgie. Juste l'impression d'avoir fait tout ce que j'ai pu aussi longtemps que possible. Malheureusement, ça devient très difficile et il faut s'arrêter là. Mais il ne s'est pas passé beaucoup plus que ça.
Quel regard portez-vous sur la décision de Jo-Wilfried Tsonga, qui arrêtera, lui, après ce Roland-Garros ?
Pour Jo, c'est un peu différent, chacun son histoire. Ces dernières années ont été beaucoup plus dures pour lui aussi, déjà physiquement mais aussi sentimentalement, parce que depuis qu'il a eu ses enfants et son premier, son petit chouchou (sic), c'était déjà plus dur pour lui de partir sur le circuit. Il y a eu une cassure à ce moment-là. Il a essayé, car il a envie de jouer, il adore ça, il adore l'ambiance, l'atmosphère, il adore aussi le côté social du tennis et voir les autres joueurs jouer. Tous les jours, il monte une académie (il éclate de rires). Il adore être là, mais c'est un peu la même chose : il y a un moment, c'est dur de lutter contre le temps, ça arrive comme ça. Je pense qu'il espérait encore revenir éventuellement quand il s'est remis à jouer cet hiver. Il ne jouait pas trop mal... Et finalement, un peu pareil : des résultats qui sont un peu décevants en début d'année, le classement qui recule, se dire que ça va être très compliqué de revenir, que ça demande beaucoup d'efforts et que le corps ne les supporte pas. Ce n'est pas simple.
"L'impression d'être professionnel depuis que j'ai dix ans"
Seriez-vous déçu de ne pas atteindre les 500 victoires, et vous en sentez-vous capable ?
(Il rit) Alors pas du tout, parce que je ne me rappelle pas avoir passé les 400, ni les 300. Et honnêtement, passer les 500, ça ne va pas changer grand-chose. Après, est-ce que je m'en sens capable ? Ce n'est pas facile. On verra bien, mais ça ne changera absolument rien à ma vie (rires), que ce soit atteint ou non. Comme celles d'avant en fait.
Allez-vous tout couper avec ce monde du tennis ou doit-on s'attendre à vous revoir ?
Tout couper, non. Je vais couper un temps, ça, c'est sûr. Je n'ai pas du tout envie d'enchaîner tout de suite. J'ai envie de rester chez moi, de profiter de mes enfants, que je n'ai pas vus depuis toujours en fait. C'est une carrière très longue, je dois être sur le circuit depuis 17 ans, donc c'est vraiment très long. Une belle pause de six mois ou un an sans voir personne, ça ne va pas me faire de mal non plus. Après, j'adore le tennis, ça a toujours été ma passion, et je ne resterai jamais très loin du tennis, ça, c'est sûr. Comment, sous quel format ou dans quel rôle ? Ce n'est pas encore clair, parce que j'ai toujours voulu être joueur, et ce que je ferai après le sera par défaut. Je suis joueur de tennis dans ma tête et je me suis toujours vu joueur de tennis depuis tout petit. Honnêtement, je ne sais pas du tout ce que j'aurais fait d'autre si je n'avais pas été joueur de tennis. Je vais finir ça à fond jusqu'à la fin de l'année, et après, je prendrai le temps et je verrai ce que je fais. Je le vois vraiment dans ce sens-là. Je n'ai rien qui m'attend ou qui me motive de simplement finir aussi bien que possible.
Etes-vous fier de votre carrière et avez-vous atteint tout ce que vous vouliez faire ?
Fier, ce n'est pas le mot. J'essaye vraiment de voir les choses très simplement : j'ai fait du mieux possible. Est-ce que ça aurait pu être mieux ? Oui. Est-ce que ça aurait pu être moins bien ? Sûrement aussi. J'ai essayé de faire du mieux possible, tout le temps. Est-ce que l'on ne fait que de bons choix ? Non, forcément. Des moments, on est fier de ce que l'on réussit à faire. Des moments, on est déçu. Le chemin est long, et c'est 17 années sur le circuit, mais, finalement, je veux être joueur de tennis depuis que je suis tout petit, donc je pourrais presque dire que je suis professionnel depuis que j'ai dix ans (rires). Sur autant de temps, tu n'es pas parfait partout, tu n'es pas mauvais tout le temps non plus. Tu essayes de faire du mieux possible, et le résultat est là. Et ce résultat, je ne le juge pas en absolu. C'est plus : je termine ma carrière, est-ce que j'ai des regrets ? Et finalement, je n'en ai pas. Il y a des matchs que j'aurais pu gagner, mais il y a aussi un paquet que j'aurais pu perdre.
Quel est votre meilleur souvenir ?
Comme on joue très longtemps, il n'y a pas un souvenir en particulier, il y en a trop. J'ai de très bons souvenirs de performance sur le terrain, mais aussi de très mauvais. Il y en a d'autres où la performance n'était pas grandiose, mais le contexte émotionnellement était très important, comme ma première victoire en tournoi ou ma victoire au tournoi de Metz avec mon petit qui vient de naître. C'est autre chose que d'avoir battu Nadal ou Federer, où là, on est sur de la performance purement tennis. A l'arrivée, il y a beaucoup de choses. Il y a eu de grandes joies, des déceptions, des matchs courageux, des retournements de situation et, à l'inverse, des matchs cauchemardesque. L'année dernière à Bercy, où tu mènes 5-1, 40-0, tu perds. Ca arrive à la toute fin de ta carrière, mais tu t'en rappelles encore. Il y a de tout. Sur autant d'années, c'est inévitable. Beaucoup de choses qui se mélangent. Sur 17 ans, dans l'ensemble, j'ai fait le max.