Le coup de gueule de Benoît Paire après son élimination

Le coup de gueule de Benoît Paire après son élimination©Media365

Rédaction Media365, publié le jeudi 01 octobre 2020 à 11h11

Agacé autant par les conditions dans lequel se déroule ce Roland-Garros qu'il a quitté mercredi dès le 2eme tour que par les critiques envers les joueurs français, Benoît Paire ne mâche pas ses mots.

Benoît Paire, comment expliquez-vous cette nouvelle défaite ?
C'est physiquement. En termes de tennis, il y avait la place. À partir du moment où au bout d'une heure, j'arrête... Dès que les échanges commencent à durer, à partir du moment où je perds le premier set, je pense que c'est dans la tête et les jambes. Je ne suis pas en grande forme. Tout le monde le sait depuis le début. Je savais que cela allait être comme ça le prochain match. J'espérais juste gagner le match, parce qu'il y avait la place. J'ai juste retardé l'échéance, je suis fatigué. Bien sûr que personne ne peut se rendre compte de ce que l'on a vécu. Je ne m'attendais pas à faire des miracles. Mon niveau de jeu et le fait de tenir quatre sets, c'est bien. Je craque. Ce n'est pas grave, je suis limite soulagé d'avoir perdu et j'ai hâte de retrouver le vrai Roland-Garros l'année prochaine.

En conséquence, à quoi aspirez-vous jusqu'à la fin de la saison ?
Je vais jouer les tournois qu'il y a à jouer. Je crois qu'il y a Cologne, je vais peut-être y aller. Je vais déjà un peu rentrer chez moi. Je vais voir mes amis, profiter de tout le monde. Cela fait six semaines que je ne suis pas rentré chez moi, que je suis dans des chambres d'hôtel. J'ai juste envie d'aller faire un resto, même si cela ferme à 22h00 et que ce n'est pas possible de rester plus tard parce qu'il y a le virus. J'ai juste envie de pouvoir vivre sans masque toute la journée en étant chez moi tranquillement. C'est compliqué toute cette situation, elle n'est pas facile. Voilà. Je suis juste déçu, parce que physiquement je n'étais pas prêt, mais en termes de niveau de jeu, je ne suis pas inquiet pour l'année prochaine. C'est ça que je vois. J'ai envie de faire une belle saison l'année prochaine, comme je l'ai annoncé déjà avant le tournoi. Ce n'est pas une surprise pour moi de perdre au deuxième tour. Je veux simplement bien récupérer et repartir sur une belle préparation pour faire une belle saison 2021. C'est tout ce que je vais retenir pour l'instant. Ce Roland-Garros, c'était cool de venir, mais j'ai hâte de retrouver les vraies atmosphères de Roland, avec les gens et tout ce qui se passe en dehors, avec l'effervescence du public qui nous pousse jusqu'au bout, comme j'ai vécu l'année dernière. Là, c'est un peu dur, même s'il y avait un peu de monde. Je remercie les gens d'être venus pour m'encourager, mais ils ont bien vu que je n'étais pas dans l'état physique pour tenir le coup.

Parleriez-vous d'une saison à oublier définitivement ?
Oui, mais pas que pour moi. Elle est à oublier pour beaucoup de monde. Honnêtement, je parle à beaucoup de joueurs, ils sont là mais ils ne jouent pas vraiment comme un tournoi du Grand Chelem. On va dire qu'il y a des gros matches, mais la plupart des joueurs sont contents de rentrer chez eux quand ils ont perdu alors que ce n'est que notre quatrième tournoi. La plupart des joueurs n'ont pas bougé de leur chambre d'hôtel non plus et on ne fait que club-hôtel, club-hôtel. Si c'est pour jouer au tennis comme ça, dans ces conditions-là, ce n'est pas un réel plaisir, en ayant des tests toute la journée, en se demandant si on va être positif ou négatif. C'est épuisant et puis, surtout le tennis, cela le rend beaucoup moins fun. On prend moins de plaisir sur le court. Après, il y a toujours des mecs qui sont bien préparés, qui jouent quelque chose, qui sont en forme. Pour eux, c'est plus facile.

Cela n'enlève rien à la belle performance de votre adversaire...
Dans des conditions normales, ce match, aujourd'hui (mercredi), je ne le perds pas. Voilà, c'est ce que je retiens. Après, je félicite Federico, il a fait ce qu'il fallait pour me battre. Mais dans l'ensemble, je pense quand même que si ça se rejoue l'année prochaine dans un Roland normal, je pense que je ne vais pas perdre ce match, en étant préparé et n'en ayant pas fait dix jours et cinq jours dans les chambres d'hôtel sans aucune préparation physique.

Paire : « Les conditions avantagent vraiment Stan »

Doit-on comprendre que vous étiez lessivé physiquement, mais pas mentalement en fait ?
Les deux. Quand physiquement et mentalement, on n'est pas bien, on ne peut pas être... L'un va avec l'autre. Je suis vraiment positif. Ce que je dis depuis le début, c'est que cette année, elle est très particulière. Ce n'est pas le style de saison qui me fait plaisir : jouer devant personne, en faisant des tests toute la journée et en étant confiné dans une chambre à ne pas pouvoir faire un resto avec nos potes, à ne rien pouvoir faire, en étant là, en jouant juste avec trois personnes dans notre box. C'est compliqué pour moi. Ce n'est pas pour ça que je joue au tennis. Le plaisir que je prends à jouer sur un court n'est pas dans le fait d'être comme ça. Il est dans le fait de partager ça avec les gens, le fait de prendre un peu d'adrénaline avec le public. L'année dernière, j'ai vécu de belles émotions ici. Donc, revenir comme ça dans un stade à moitié vide, c'est compliqué. Je suis très positif, parce que je veux juste faire une saison 2021 au top. Je vais essayer de tout faire pour me préparer et être bien pour la saison prochaine. J'espère que cela va se jouer dans des conditions normales. Je suis très positif, et voilà, pour moi, ce n'est pas ce tournoi. Je n'avais pas misé gagner Roland-Garros cette année. Déjà gagner un tour, j'étais très surpris et très content. Je vais juste essayer de récupérer, partir sur cette fin d'année avec deux ou trois tournois comme ça et après, on verra. L'objectif principal, et je répète et je l'ai dit avant le tournoi, c'est 2021. J'essaie de me préparer en fonction et je vais essayer de faire une préparation adaptée pour être en forme en début d'année.

Les conditions de jeu sont telles cette année que l'amorti sera un coup très important tout au long de cette quinzaine ? Qu'est-ce que cela vous inspire, vous qui maîtrisez ce geste à merveille ?
Je trouve dommage et grave de parler de ce coup comme le plus important du tournoi, l'amorti. Ce n'est pas normal de dire ça. Les balles devraient normalement être assez vives. On devrait avoir un retour avant le tournoi pour se rendre compte que les balles ne sont pas adaptées aux conditions. C'est compliqué quand on se rend compte qu'on sert de toutes nos forces, que la balle part à 185 et que l'autre est dessus, ce n'est juste pas normal pour un Roland-Garros. Ça n'a jamais été comme ça. Les conditions de Roland, c'est toujours un peu rapide avec des hauts rebonds. Si là, c'est des balles molles en septembre, ce n'est juste pas normal. Après, ce n'est pas pour ça que j'ai perdu. Qu'il y ait des balles molles ou dures, physiquement je ne pouvais pas tenir. Il faut travailler là-dessus pour l'année prochaine, essayer de changer ça. Ce n'est pas facile de jouer avec ces conditions. Cela a un avantage certain. Y en a certains avec des grosses frappes comme Stan, par exemple, lui il adore.

Votre copain Stan Wawrinka sera opposé à Hugo Gaston, révélation de ce début de tournoi et dernier Français en course. Comment doit-il aborder ce match ?
Je lui souhaite bonne chance, parce que j'ai vu que Stan était très en forme, qu'il joue très bien au tennis en ce moment. Il a une très belle frappe de balle. Je l'ai vu contre Koepfer tout à l'heure, cela jouait très bien. Hugo, je suis content, c'est un jeune. Cela fait un petit moment qu'il faut qu'il confirme. Il a été médaillé aux Jeux Olympiques des jeunes ou je ne sais pas quoi. Ce sera un beau match. Jouer Stan maintenant, ce n'est pas facile, mais il a toutes ses chances. Après le problème, c'est que les conditions avantagent vraiment Stan, qui peut lâcher ses gros coups, et avec ces balles qui n'avancent pas, ces balles un peu molles, il a la force avec son gabarit et sa puissance de frappe de déplacer Hugo et de lui faire mal. Après, ce n'est pas non plus un exploit. C'est très bien ce qu'il a fait tout à l'heure. Il est capable de battre des joueurs comme ça, surtout qu'ils ont un peu le même jeu. Il a eu un peu plus de variété dans son jeu. J'ai regardé le match. C'est bien pour Hugo. Maintenant, ça ne va pas être facile contre Stan. Je lui souhaite bonne chance. Stan, c'est aussi mon pote, donc je ne vais pas non plus dire : allez Hugo.

Paire : « Il ne faut pas tirer d'enseignements de cette saison »

Que répondez-vous à ceux qui pensent aujourd'hui que derrière les quatre mousquetaires du tennis français (Monfils, Simon, Tsonga et Gasquet), il n'y a aucune relève, et ce pour probablement de très longues années, et que cette génération est finie ?
Ce débat est ridicule. On a quand même un mec qui est dans les dix et on arrive à dire qu'elle est finie, la génération. Je suis désolé, mais la Monf, quand on le voit en début d'année, est-ce que quelqu'un dit : là, c'est fini pour les Mousquetaires ? Alors que quand on le voit en début d'année, on le mettait favori pour Roland-Garros. Il faut se rendre compte que cette année, il y a eu le confinement, cette saison particulière sans public, tout ça. La Monf, pendant le confinement, ce n'est pas le plus sérieux. Il ne s'est pas non plus entraîné de dingue pour se dire : voilà, moi je veux faire si, ça, ça. Il aime le tennis, mais il aime jouer devant du monde. Au fond de lui, cela le rend triste un Roland comme ça. Quand il rentre sur Suzanne-Lenglen et qu'il n'y a pas bruit, je pense que quand il a connu ce qu'il a connu, c'est très compliqué pour lui. Il reste neuvième mondial

Donc, pour vous, cette génération a encore un avenir ?
Oui, cette génération n'est pas du tout finie. Il faut voir Richard (Gasquet) comme il était avant le confinement. Pendant les dix jours, il était très très bien physiquement. Il se sentait bien au niveau du tennis, il était très motivé. Finalement, cela l'a coupé dans son élan. Gilles Simon, c'est son style de jeu qui n'est pas facile, mais il est capable de gagner de très bons titres. Jo (Wilfried-Tsonga), on ne sait pas trop où il en est. Il faut arrêter des débats comme ça, en disant que c'est la fin des quatre Mousquetaires. On a encore un mec qui est dans les dix. Ce n'est pas fini. C'est très rare d'avoir des mecs dans les dix. Profitons-en déjà. Et la nouvelle génération, on a Ugo (Humbert). Même s'il a perdu au premier tour ici, il va en faire de très bons résultats parce qu'il joue très bien au tennis. Il peut rentrer dans les dix assez rapidement aussi. Il joue très bien au tennis, il frappe bien la balle, il a une très bonne mentalité. Lucas (Pouille) est blessé, ce n'est pas de chance pour lui, mais on va voir comment il va revenir. Il faut juste attendre un peu avant de tirer des : « ça y est, c'est comme ça, c'est ci, c'est ça ! »

Vous paraissez très remonté...
Ça m'énerve un peu, parce qu'on a des très bons joueurs et on ne s'en rend pas vraiment compte. Un Monfils, s'il se prépare l'année prochaine, on va encore nous le mettre favori. S'il joue bien en début d'année, on va encore dire : ça y est, c'est son année à Gaël ! Alors que trois mois avant, vous avez dit : c'est peut-être la fin de la génération des Mousquetaires. Attendez un peu. C'est une saison très particulière, il ne faut pas non plus tirer des enseignements de cette saison. Elle ne veut rien dire, cette saison. Il y a des mecs très préparés et on sait qu'ils vont très bien jouer. Mais il y en a aussi qui n'ont pas fait grand-chose. Moi, je n'ai pas fait grand-chose. Gaël, cela a été particulier. On ne sait pas quand on reprend. On a repris dans des conditions extrêmes. Ce n'est pas non plus la fin du monde. On n'est pas triste, on est rentré chez nous. Je vais rentrer chez moi, je suis très content, alors que d'habitude, quand je perds à Roland, je suis effondré. Là il ne se passe rien. Regardez la conférence de presse. J'ai des sièges vides en face de moi, en train de regarder une caméra. Ce n'est pas comme d'habitude. Donc, il faut juste s'arrêter, se calmer. L'année prochaine, on verra et si l'année prochaine, ils font tous une mauvaise saison, on dira peut-être que c'est la fin. Mais il ne faut pas tirer des enseignements trop vite sur cette saison.

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