Thomas Siniecki, Media365 : publié le mardi 17 août 2021 à 09h00
Le Tour d'Espagne 2017 a fait vivre toutes les émotions à Christopher Froome. D'abord celle d'un succès sportif historique, avant de connaître une petite descente aux enfers plusieurs mois après, à cause d'un contrôle anormal.
Quand Christopher Froome arrive sur les routes de la Vuelta 2017, ce n'est pas vraiment au sommet de sa forme. Même s'il vient de décrocher son quatrième (et dernier) succès sur le Tour de France, c'était non sans souffrir, par rapport à ses victoires écrasantes de 2013 ou encore 2016, où il avait relégué Romain Bardet à plus de quatre minutes. Cette fois, il n'a laissé Rigoberto Uran qu'à moins d'une minute (54 secondes) et n'avait pas réussi à remporter le Critérium du Dauphiné auparavant. Dès le lendemain du Tour, il annonce sa participation au Tour d'Espagne, moins d'un mois plus tard. Un contexte qui rendra d'autant plus fort son doublé, seulement le troisième après Jacques Anquetil en 1963 et Bernard Hinault en 1978 - et le premier dans cet ordre, la Vuelta ayant auparavant lieu en avril et mai.
Dès le troisième jour, il s'empare du maillot rouge de leader malgré sa troisième place de l'étape, derrière Vincenzo Nibali et David De La Cruz. Il ne le lâchera plus une seule fois. "Je ne m'attendais pas à prendre le maillot (propos relayés par Cyclismactu.net). C'est une grande surprise. Mes coéquipiers ont été fantastiques, comme Gianni Moscon qui dispute son premier grand Tour. Il a été très bon, comme le reste de l'équipe." A la veille du premier repos, il remporte la neuvième étape, "une journée incroyable" : "La façon dont ça s'est passé, dont mes coéquipiers ont roulé dans les derniers kilomètres pour m'emmener... C'est tout simplement fantastique. C'est un sentiment extraordinaire d'arriver à la fin de cette première partie avec le maillot rouge et un écart intéressant sur les autres prétendants au général."
"Des équipiers formidables"
Mais à l'occasion de la douzième étape, c'est la chute dans la descente, et même deux ! Encore grâce au train de la Sky, il parvient à rester leader : "Je suis soulagé que ce ne soit pas plus grave. Ce n'est jamais une bonne chose de tomber. J'avais deux équipiers avec moi, Mikel Nieve et Wout Poels, et ils ont été formidables. Ils m'ont aidé jusqu'à l'arrivée et m'ont permis de limiter les pertes sur le groupe de Vincenzo Nibali. J'ai simplement glissé, j'ai perdu ma roue avant dans un virage. C'était pareil pour la deuxième chute. Evidemment, je n'aime pas perdre du temps, mais je suis heureux que ce soit seulement 20 secondes et pas une minute." Tout se jouera ensuite sur les quatre derniers vrais jours de course, du mercredi au samedi.
D'abord la seizième étape, un contre-la-montre où il s'impose et reprend donc du temps : 57 secondes par rapport à Vincenzo Nibali sur la journée, 1'58" au général. Le lendemain, l'Italien et Alberto Contador, alors cinquième à près de cinq minutes, attaquent sur les pentes de l'Alto de los Muchachos. Pas suffisamment pour faire réellement vaciller Froome, qui parvient à contrôler à nouveau lors des deux arrivées au sommet du vendredi et du samedi, où Poels l'emmène encore à la perfection pour entériner sa victoire sur le juge de paix de l'Angliru. Froome laisse Vincenzo Nibali à 2'15" et Ilnur Zakarin à 2'51", ce qui lui offre aussi le cinquième grand Tour de sa carrière (en attendant le Giro 2018 puis de récupérer en 2019 le gain de la Vuelta 2011).
"C'est un sentiment absolument incroyable. Quelle façon de mettre fin à ces trois semaines massives de course ! Et bien sûr, pour moi, réussir à faire le doublé Tour de France et Vuelta, c'est juste incroyable... Merci à tous pour le soutien apporté au cours des dernières semaines et au cours des derniers mois, et bien sûr à mon équipe, fantastique ces dernières semaines." Pas épargné avec la rumeur d'un moteur dans son vélo, après un demi-tour effectué sans pédaler à l'issue d'une étape - et alors que la pente semblait en montée -, Froome ne s'imagine alors pas qu'il ne s'agira que d'une péripétie par rapport à ce qui suivra quelques mois plus tard. En décembre, un contrôle positif anormal au salbutamol est ainsi révélé, celui-ci ayant eu lieu à l'arrivée de la 18eme et antépénultième étape (celle du vendredi).
"Mon asthme s'est aggravé sur la Vuelta, et j'ai suivi les conseils du médecin de l'équipe pour augmenter mon dosage, se justifie Froome. Comme toujours, j'ai pris soin de ne pas dépasser la dose permise." L'équipe avait été avertie de ces données dès le mois de septembre, puis ce sont Le Monde et le Guardian qui ont révélé l'information peu avant Noël. Il remporte le Tour d'Italie quelques mois après, l'enquête étant alors toujours en cours. Début juillet, la direction du Tour de France lui interdit en revanche de participer, contredite dans la foulée par l'UCI qui blanchit le coureur après un appel de l'équipe Sky. Il finira troisième après une chute lors de la première étape, laissant la victoire à son coéquipier Geraint Thomas. Ce Tour d'Espagne 2017, bien qu'historique, aura coûté un certain prix au "Kényan blanc".