Emmanuel LANGELLIER, Media365 : publié le lundi 18 mai 2020 à 14h40
Parti pour perdre une première finale de Ligue des Champions, Manchester United avait réalisé un incroyable retournement de situation dans le temps additionnel pour renverser le Bayern Munich (2-1) en 1999.
Des finales au scénario renversant, il y en a eu quelques-unes ces vingt dernières années. Le Real Madrid a triomphé de son voisin de l'Atlético en prolongation en 2014 après avoir égalisé à la dernière minute du temps réglementaire (4-1). Mené 3-0 à la mi-temps par l'AC Milan, Liverpool a décroché sa cinquième C1 en 2005 (avant la sixième remportée l'année passée) au terme d'une rencontre légendaire (3-3, 3 tirs au but à 2). Les deux institutions espagnole et anglaise savaient qu'il faut toujours y croire car Manchester United avait montré la voie en 1999.
Le mercredi 26 mai 1999, MU a en effet réalisé un incroyable finish resté dans toutes les mémoires pour décrocher sa deuxième C1 après 1968. Très longtemps mené par le Bayern Munich et parti pour s'incliner une première fois en finale de la plus prestigieuse des compétitions européennes, le club mancunien inscrivait 2 buts dans les derniers instants qui lui permettaient d'emporter la décision sur le fil (2-1). Ce qui était absolument impensable, les hommes d'Alex Ferguson l'avaient sorti en deux minutes. Le fameux « Fergie Time », l'espace en fin de rencontre durant lequel l'équipe mancunienne a fait la différence de nombreuses fois grâce à son mental.
Déjà une remontée en demies contre la Juventus
En demi-finale déjà cette saison-là, Manchester United avait fait parler sa force de résilience. Menés 1-0 dès la 8eme minute au match aller par la Juventus Turin de Zinedine Zidane et Didier Deschamps, les Red Devils avaient arraché le nul dans leur antre d'Old Trafford à la dernière minute suite à un but de Ryan Giggs (1-1). Au retour à Turin, La Juve avait vite mené 2-0 après 11 minutes (doublé de Filippo Inzaghi). Avant la remontée fantastique des partenaires de David Beckham, qui allait terminer deuxième du Ballon d'Or France Football en fin d'année, derrière Rivaldo. Roy Keane (24eme), Dwight Yorke (34eme) et Andy Cole (83eme) passaient par là et hissaient MU en finale pour la première fois depuis 31 ans.
Man U gagnait ainsi le droit de retrouver le Bayern Munich qu'il avait affronté en début de compétition durant cette saison 1998-99. Dans le groupe D, les deux géants du football continental n'avaient pu se départager. Au match aller, Teddy Sheringham, futur héros de la finale, avait égalisé... contre son camp à la 90eme minute en faveur du Bayern à Munich (2-2) alors que MU menait depuis la 49eme. Au match retour lors de la 6eme et dernière journée, Hasan Salihamidzic avait répondu à Roy Keane (1-1).
Manchester United et le Bayern pour le triplé sur la saison 98-99
Sacrés tous deux champions dans leur pays quelques jours auparavant, Manchester United et le Bayern Munich jouent pour le triplé ce 26 mai 1999. MU a raflé la Cup devant Tottenham (2-1) tandis que le club bavarois doit affronter le Werder Brême en finale de la Coupe d'Allemagne quelques jours plus tard (match qu'il gagnera). La finale se dispute au Camp Nou de Barcelone devant 90 000 spectateurs. Au sifflet, le meilleur arbitre du monde : l'Italien Pierluigi Collina.
Côté allemand, Ottmar Hitzfeld aligne sa formation en 5-2-3. Devant Oliver Kahn, Lothar Matthäus est libéro avec Thomas Linke et Samuel Kuffour autour de lui, Markus Babbel et Michael Tarnat évoluent sur les côtés. Stefan Effenberg et Jens Jeremies animent l'entrejeu, le front offensif est mené par Mario Basler, Carsten Jancker et Alexander Zickler. En face, Alex Ferguson déploie son habituel système en 4-4-2 avec une défense Gary Neville-Ronny Johnsen-Jaap Stam-Denis Irwin devant Peter Schmeichel, un milieu Ryan Giggs-David Beckham-Nicky Butt-Jesper Blomqvist et le prolifique duo d'attaque Dwight Yorke-Andy Cole.
Le Bayern Munich se dirige tout droit vers une quatrième C1 au palmarès mais...
Entreprenant rapidement, le Bayern Munich concrétise et MU paie encore son manque de concentration en début de rencontre. A la 6eme minute, Basler ouvre le score sur un coup franc enroulé à ras de terre du pied droit des vingt mètres. Schmeichel est impuissant sur sa gauche (1-0). Les Red Devils ont ensuite une vaine réaction. Ils dominent sans marquer. Cole est jugulé, Beckham, si habile normalement, ne cadre pas un coup franc.
En seconde période, les Allemands se procurent les meilleures opportunités en profitant des espaces laissés au sein de l'arrière-garde britannique. Mais Schmeichel laisse les siens dans le coup. Il est surtout sauvé à deux reprises par ses montants, son poteau droit et sa transversale. Sur un joli lob de Mehmet Scholl, entré en jeu à la 71eme à la place de Zickler, puis sur une reprise acrobatique de Jancker. Malgré quelques situations, Man United n'y arrive pas. Les minutes s'égrènent dangereusement pour le club anglais. Le Bayern Munich se dirige tout droit vers une quatrième C1 après le triplé 1974-75-76.
« Les perdants dansaient pendant que les vainqueurs pleuraient ! »
Le temps réglementaire se termine. Lennart Johansson, le président de l'UEFA, quitte la tribune présidentielle du stade catalan pour aller remettre la Coupe aux grandes oreilles au capitaine Oliver Kahn. Alors qu'il arpente le couloir menant à la pelouse, le dirigeant croise Bobby Charlton, légende de Manchester et directeur technique du club anglais. « Je suis désolé », lui lance-t-il, compatissant. Lorsqu'il débarque au bord du terrain, il est saisi par une scène stupéfiante. « Les perdants dansaient pendant que les vainqueurs pleuraient ! », détaillera-t-il après la rencontre.
Le patron de l'instance européenne a raté le fabuleux renversement de vapeur opéré par les petits gars de Ferguson ! Eh oui, l'inconcevable s'est produit. Manchester United a tout d'abord égalisé, et arraché, pensait-on alors, la prolongation, sur une déviation décisive de Teddy Sheringham, qui avait pris la place de Blomqvist à la 67eme minute. On joue alors la première minute du temps additionnel et Beckham lève un corner sur la gauche. Monté dans la surface en désespoir de cause, Schmeichel n'est pas loin de dévier de la tête, puis Giggs reprend mollement du droit à l'entrée de la surface. A l'affût dans les six mètres, le numéro 10 de MU prolonge et place une reprise victorieuse du pied droit au ras du sol près du poteau (1-1) ! La folie s'empare de l'enceinte barcelonaise qui va trembler encore plus fort.
Sheringham dévie de la tête puis Solskjaer tend la jambe droite
Troisième minute du temps additionnel. Sur le pré depuis la 81eme (il a remplacé Cole), Ole Gunnar Solskjaer lutte pour obtenir le corner. C'est la dernière action du match. Encore sous le choc de l'égalisation, le camp bavarois est sous une énorme pression. De son soyeux pied droit, Beckham enroule ce nouveau coup de pied de coin sur le flanc gauche. Sheringham dévie de la tête au premier poteau puis Solskjaer, positionné à deux mètres du but, tend la jambe droite. Le ballon file dans la lucarne de Kahn, battu pour la deuxième fois en deux minutes !
Tarnat baisse la tête de dépit, Solskjaer part dans une course endiablée, poursuivi par ses coéquipiers en liesse tandis que Schmeichel, resté cette fois près de son but, exprime sa délivrance dans un saut périlleux spectaculaire. C'est fini, MU l'emporte (2-1). Les Allemands sont à terre, Kuffour frappe de rage la pelouse avec son poing droit. Le Bayern a perdu une finale qu'il allait gagner, Manchester United décroche un titre insoupçonné et déroutant.