Thomas Siniecki, Media365 : publié le mardi 22 février 2022 à 09h30
Michael Jordan n'a pas joué au basket, il est le basket. Difficile de trouver une personne de plus d'une dizaine d'années qui, sur cette planète, ne sache absolument pas qui est la légende des Bulls, un des plus grands sportifs de l'histoire.
Un sportif a-t-il déjà plus révolutionné le monde que Michael Jordan ? Avec Mohamed Ali, oui, ils sont probablement deux, dans la trace laissée bien au-delà du simple impact sur leur discipline. Le légendaire boxeur américain avait 21 ans lorsque Michael Jordan a vu le jour à Brooklyn, en 1963. Drafté par les Chicago Bulls en 1984 en troisième position, et déjà champion olympique dans la foulée, il impose durant la fin des années 80 son style aussi aérien en attaque que dur en défense. Ses statistiques, particulièrement en termes de points marqués, sont immédiatement historiques et demeurent encore pour beaucoup des références en NBA. Après deux premières années à 28 et 22 unités de moyenne par match, il oscillera ensuite entre 30 et 37 points chaque année jusqu'en 1993. En 1988, son dunk au All-Star Game est devenu un poster pour l'éternité.
Au-delà de ces nombreux exploits personnels, c'est bien dans les années 90 que "MJ" va passer ce cap qui le mènera au rang de dieu vivant. D'abord grâce à ses trois premiers titres consécutifs avec les Bulls, de 1991 à 1993. Mais aussi au sein de la Dream Team, cette sélection américaine championne olympique à Barcelone en 1992 et qui reste encore probablement comme la plus dominante de tous les temps sur un seul tournoi. A tout jamais, il y a eu le Brésil 1970 en football et il y aura la Team USA de 1992 en basket... Michael Jordan est associé à Larry Bird et Magic Johnson, ses grands rivaux des Boston Celtics et des Los Angeles Lakers, ainsi que Karl Malone, John Stockton (Utah Jazz), Pat Ewing (New York Knicks) et bien sûr Scottie Pippen, son fidèle lieutenant qui est le seul à l'accompagner en tant qu'autre joueur de Chicago.
Bird : "Dieu déguisé en Jordan"
En 1993, il décide alors de prendre une première fois sa retraite du basket : la surprise est générale. Plus tard, dans son autobiographie en 1998, il assure que l'assassinat de son père (le 23 juillet 1993, par deux adolescents) n'a pas été le seul déclencheur. La puissante usure mentale, notamment durant les JO 1992, l'avait déjà conduit à y songer. Il se lance alors dans le baseball, toujours à Chicago (White Sox), en souvenir de son papa. Michael Jordan revient chez les Bulls en mars 1995, près de deux ans après son départ. Il inscrit 55 points lors du match contre les Knicks, sur leur parquet du Madison Square Garden, pour une de ses premières rencontres, mais il est rapidement éliminé en playoffs par Orlando. "Air Jordan" échaudé craint l'eau froide : ça n'arrivera pas deux fois.
Les Bulls réussissent ainsi leur deuxième "Three-peat" de 1996 à 1998, cette confirmation d'une dynastie qui va placer Michael Jordan au-dessus des cieux. Scottie Pippen est toujours là, Dennis Rodman, Steve Kerr et Toni Kukoc sont venus s'ajouter à la bande. Lors du dernier match décisif, le meilleur joueur de l'histoire inscrit 45 points et Chicago bat le Jazz 4-2. La saison suivante, un lock-out (grève) le convainc définitivement de prononcer une deuxième fois sa retraite. Au firmament, plus que jamais. Il faut attendre 2000 pour voir le mythe revenir encore aux affaires, mais cette fois en tant que co-propriétaire de la franchise des Washington Wizards. En 2001, décidément trop atteint par le virus du basket, il replonge en tant que joueur à l'âge de 38 ans.
Sans pouvoir faire de miracles, il arrête définitivement le 16 avril 2003 lors d'un déplacement chez les 76ers. Michael Jordan reçoit une ovation mémorable durant trois minutes. Egalement icône vestimentaire avec sa chaussure Nike baptisée Air Jordan, et ce quasiment depuis le début de sa carrière (en 1985), du cinéma aussi avec son rôle dans Space Jam en 1996, le sextuple champion NBA est une référence absolue. Sportive, bien sûr, mais aussi sociétale pour l'intégration des noirs américains. Grâce à Michael Jordan, tous les enfants comme leurs parents ont grandi aux Etats-Unis - et pas seulement, d'ailleurs - avec le basket en phénomène enfin popularisé, au pays du football roi (le football américain, bien entendu). Il a encore profondément ému par ses pleurs durant les funérailles de Kobe Bryant, il y a un peu plus de deux ans.
"C'était Dieu déguisé en Michael Jordan", disait de lui Larry Bird au sortir d'un match en 1986 entre les Bulls et les Celtics. Des phrases de ce genre, on pourrait en relayer par centaines. Ses records individuels sont à peu près du même nombre, comme figés dans le grand livre de la NBA, et il faut vous armer d'une certaine patience si vous souhaitez tous aller les consulter sur sa page Wikipédia. Le documentaire The Last Dance, diffusé par Netflix au début de la pandémie de Covid (en avril et mai 2020) et qui relayait des images d'archives du dernier passage de Michael Jordan aux Bulls, a permis de faire le lien entre les générations. Et de constater aussi à quel point il demeure la seule icône qui, justement, soit de nature à transcender les époques.