Mathieu Warnier, Media365 : publié le jeudi 08 août 2024 à 18h30
Voulu par World Athletics pour des questions de visibilité de l'athlétisme, le tour de repêchage instauré à l'occasion de Paris 2024 est la cible de critiques de la part des athlètes. Certains y voient tout de même du positif.
Le programme de l'athlétisme a évolué pour Paris 2024. Sur les courses allant du 200m au 1500m, World Athletics a instauré un repêchage, qui permet aux athlètes n'ayant pas pu passer le premier tour d'avoir une chance supplémentaire d'atteindre les demi-finales. Selon le président de la fédération internationale Sebastian Coe, cette innovation a pour but de donner « une plus grande visibilité » pendant les Jeux Olympiques avec des repêchages « soigneusement programmés pour garantir que chaque épreuve du programme olympique conserve sa part d'attention ». Sauf que, parmi les athlètes, cette décisions de l'instance internationale ne recueille pas que des opinions positives. « On le dit depuis le départ, on ne pense pas que ce soit une bonne idée, a ainsi confié l'athlète belge Dylan Borlée auprès de la RTBF. Surtout devoir enchaîner un 400m le soir et puis mettre le repêchage le lendemain matin. Pour ceux qui ont fait 44''60 hier et sont passés par le repêchage alors qu'ils avaient des chances d'aller en finale, je trouve que ce n'est pas à faire. »
Brown indécis, Crittenden convaincu
De son côté, le sprinteur canadien Aaron Brown concède que si « c'est un super spectacle pour la télévision », c'est également « horrible » car il aura « une course de plus dans les jambes ». Un côté sport-spectacle qui est validé par Maryse Ewanje-Epée, consultante pour France Télévisions, qui assure que « c'est spectaculaire pour le public, car cela ajoute une dramaturgie à la compétition ». Parmi les athlètes, il y en a un qui a pris fait et cause pour ce tour de repêchage. Il s'agit du spécialiste américain du 110m haies Freddie Crittenden. En effet, ce dernier a intentionnellement manqué son premier tour afin de participer à ce tour supplémentaire. « Tout le monde se qualifie pour le repêchage, a-t-il signalé au micro de NBC J'ai donc décidé de ne pas faire de choix émotionnel, de faire un choix intelligent. » Anaïs Bourgoin, quant à elle, a concédé avoir changé d'avis après avoir obtenu son billet pour les demi-finales du 800m par ce biais.
Un souci d'équité sportive ?
« Je n'étais pas pour le repêchage à la base, a déclaré la Tricolore auprès de France Info. Et puis finalement, comme je le gagne et que je vais en demies, je me dis que c'est une chance de plus. » Si cette course supplémentaire peut être bénéfique, Stéphane Diagana y voit « un vrai handicap pour ceux qui ont deux tours à passer ». L'ancien champion du monde du 400m haies a concédé dans des propos recueillis par France Info que ce changement n'est pas en accord avec sa vision de la compétition. « L'intérêt de l'athlète et l'équité doivent passer avant le spectacle », a-t-il confié. Maryse Ewanje-Epée concède qu'il n'y a « pas une grande équité » d'un point de vue sportif, « surtout quand on voit que les séries étaient vendredi soir et les repêchages pour les filles du 800m samedi matin ». Malgré tout, ces repêchages ont été marqués par une ambiance plus intense au Stade de France, qualifiée même d'« incroyable » par Dylan Borlée même si, à ses yeux, « ce n'est pas bon » pour le sport. Si Paris 2024 a permis d'expérimenter ce nouveau format de compétition, il ne semble pas prévu pour les prochains championnats du monde, organisés en 2025 à Tokyo.