Exclu/Voile : Jérémie Beyou se confie avant le départ de la Vendée Arctique

Exclu/Voile : Jérémie Beyou se confie avant le départ de la Vendée Arctique©Gauthier Lebec_Charal, Media365
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Aurélie SACCHELLI, Media365, publié le jeudi 09 juin 2022 à 10h52

Ce dimanche, s'élancera des Sables d'Olonne la deuxième édition de la Vendée Arctique, une course en solitaire qui verra les 25 concurrents parcourir théoriquement 3500 milles et passer par le nord de l'Islande, naviguant dans des eaux où la plupart ne sont jamais allés. Jérémie Beyou (45 ans), le skipper de Charal, vainqueur de la première édition, s'est confié à notre site avant le départ.

Jérémie Beyou, comment se présente cette Vendée Arctique, qui partira dimanche des Sables d'Olonne ?
On sort de la Bermudes 1000 Race, qui est une bonne entrée en matière pour cette saison, et où j'ai fini deuxième (derrière Charlie Dalin, sur cette course qui reliait Brest à Brest en passant par le cap Finisterre, ndlr). La Vendée Arctique, c'est un gros morceau, qu'il faut bien préparer. C'est quand même 10 à 12 jours de course, on va Nord en latitude, on va avoir de la météo un petit peu violente. C'est un parcours assez inédit si on fait tout le tour de l'Islande et qu'on revient par la zone de glaces (en raison de la météo, les organisateurs se réservent le droit de modifier le parcours, ndlr). Il faut bien se reposer de la précédente course et bien préparer le bateau, comme on le préparerait pour une Transat dans l'Atlantique Nord, avec des navigations assez engagées.



Vous aviez remporté la première édition, en 2020, mais le parcours avait été différent, avec un passage par le sud de l'Islande et non un tour de l'île...
C'est un parcours évolutif. C'est vrai qu'il est prévu qu'on fasse le tour de l'Islande, ce qui n'était pas le cas la dernière fois. On était quand même monté assez Nord et la durée de la course était à peu près la même. Ce n'était pas facile, même si on n'avait pas eu de vent sur la deuxième partie de course. C'était très cadencé. Les systèmes météo passent vite, ça reste des courses dont le parcours est assez court, donc on a peu de temps pour trouver un rythme. C'est difficile de trouver des plages de repos. Je m'attends au moins à ce rythme-là cette fois-ci.

L'objectif, c'est le doublé ?
Le but est de faire la course pour essayer de la gagner. La course n'est pas qualificative pour le Vendée Globe pour moi puisque je serai sur Charal 2 pour le Vendée, et là je suis sur Charal 1. Il y a dans la tête de certains l'objectif d'engranger des milles pour se qualifier pour le Vendée, mais dans la tête de ceux qui jouent les avant-postes, on est là pour essayer de gagner la course, et je sais que ce sera hyper engagé devant, hyper serré, comme d'habitude, et il faudra faire peu d'erreurs.

Beyou : "Il y a de la brume, du trafic maritime, le tableau est complet..."

Etes-vous déjà allé aussi au Nord ?
Non, jamais. J'ai déjà fait des Tours des îles britanniques, où on passe par le nord des Hébrides (à l'ouest de l'Ecosse, ndlr) et des Shetland (au nord de l'Ecosse, ndlr), qui sont très hautes en latitude, mais pas aussi haut que le nord de l'Islande. Ce sera une première, mais ce sera le cas pour quasiment tout le monde. Il y a un côté découverte qui est assez intéressant aussi.

Les mers du Nord sont-ils différentes des mers du Sud, que vous connaissez bien mieux ?
Ça se ressemble. Ce sont des mers qui sont assez désorganisées en termes de houle et d'état de la mer, car les dépressions circulent vite et les vents tournent. Ça passe de secteur sud-ouest à secteur nord assez rapidement et régulièrement, donc on a des mers qui peuvent être très hachées. Il faut ajouter le fait qu'autour de l'Islande, c'est une zone assez resserrée, pas comme l'Océan indien, avec des phénomènes de courant qui vont complexifier l'affaire, et faire que l'état de mer peut être encore plus chaotique. Il y a souvent de la brume, du trafic maritime et notamment de la pêche. Le tableau est complet (sourires), il va vraiment falloir faire preuve de vigilance, surtout le contournement de l'Islande. Rapidement après le départ, si on part par le Nord d'abord, ça va être hyper intense, car on va se retrouver tout de suite à la pointe de Bretagne, les côtes anglaises, l'Irlande..., forcément on va se prendre un ou deux passages dépressionnaires, puis la mer d'Irlande et l'Islande. Je ne sais pas trop quand on va se reposer pendant la première semaine de course.

Redoutez-vous des températures très froides ?
La dernière fois, on n'a pas eu beaucoup de vent quand on a approché l'Islande, mais il faisait vraiment très frais et on avait zéro visibilité. On voyait à peine l'étrave du bateau. Il y a une ambiance pas très sympa, un peu glauque. Ça fait penser aux navigations dans les Bancs de Terre-Neuve (à l'est du Canada, ndlr), qu'on connait quand on fait des Transat Ouest-Est, notamment pour les différents records à la voile où on part de New York ou Boston pour aller vers le cap Lizard (point le plus au sud de l'Angleterre, ndlr). C'est cette ambiance-là, en fait. Ce ne sont pas des navigations qui sont très simples, ça change des paysages sur les Transat classiques, style arrivée de Route du Rhum avec le soleil et les poissons volants.

Beyou : "Les glaces ne seront pas loin"

Au mois de juin, très au Nord, les nuits seront courtes...
Oui, il ne va presque pas faire nuit, en fait. Les nuits sont très courtes, donc ça déboussole un peu aussi. Il y a tout pour que ce soit une course hyper engagée, ça fera une belle course.

Y a-t-il un risque de rencontrer des icebergs ?
On a une zone d'exclusion dans le nord-ouest de l'Islande pour nous éviter d'aller dans les glaces, mais elles ne seront pas loin.

Vous avez annoncé l'an passé la prolongation de votre contrat avec Charal jusqu'en 2026 et la construction d'un nouveau bateau. Où en est Charal 2 ?
La mise à l'eau est prévue pour fin juin, le chantier avance bien. Le bateau a commencé à être peint, ça a de l'allure, on a hâte de faire découvrir ça à tout le monde. Une bonne partie de l'équipe est monopolisée sur la construction et la fin de l'assemblage du bateau, puis sera focalisée sur la mise à l'eau la deuxième quinzaine de juin, juste après l'arrivée de la Vendée Arctique.



Finir avec Charal 1 sur une victoire serait le meilleur scénario...
Ce serait une très belle histoire, c'est un super bateau. Ce qui est bien, c'est que sur une course comme ça, hyper engagée, je suis un bateau que je connais par cœur, dans lequel j'ai confiance, ça me rassure de le faire avec ce bateau-là, c'est un bon bateau pour cette course-là. J'espère que l'histoire se finira aussi bien qu'elle s'est déroulée les quatre années que j'ai pu y passer.

Crédit photo : Gauthier Lebec_Charal

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