Aurélien CANOT, Media365, publié le vendredi 04 février 2022 à 12h14
Triple vainqueur de l'Ultra-Trail du Mont-Blanc, amoureux éperdu de la nature et sportif très engagé en matière d'écologie, Xavier Thévenard, 33 ans, mérite d'être connu. Et pas seulement parce que ses sorties en courant dépassent parfois les cent kilomètres ou parce qu'il est capable de tout plaquer pour regarder un lynx en pleine montagne. Entretien avec le nouvel ambassadeur MAIF Sport Planète, qui se confie pour nous.
Déjà vainqueur de l'Ultra-Trail du Mont-Blanc à trois reprises, Xavier Thévenard (33 ans), un temps pénalisé par des problèmes respiratoires causés par sa maladie (la maladie de Lyme) sera de nouveau de la partie l'été prochain. Toutefois, cet athlète engagé et amoureux fou de la nature, se fait surtout un plaisir de retrouver la course pour le bonheur qu'elle lui procure et les paysages dont elle lui permet de se délecter. Car le Jurassien est comme ça : s'il aime l'ultra-trail et les grands espaces, c'est avant tout pour pouvoir ne faire qu'un avec le monde extérieur qui l'entoure. Athlète engagé, il souhaite apporter sa contribution à la transformation positive de la société. Une vision chère à MAIF, société à mission engagée en faveur d'un sport responsable et citoyen, qui ne s'est pas trompée en faisant du Kylian Jornet français son nouvel ambassadeur.
Xavier Thévenard, vous êtes le nouvel ambassadeur MAIF Sport Planète. Qu'est-ce que cela représente pour vous ?
C'est un engagement fort d'un côté comme de l'autre. Le dispositif MAIF Sport Planète se fonde sur la conviction profonde que nous pouvons tous agir pour le mieux commun. Nous menons ensemble des actions de sensibilisation sur le terrain qui vont dans le sens de ces convictions communes. Le sport peut être bon aussi pour la santé de la planète. On a tous conscience des conséquences que peuvent avoir le dérèglement climatique et les enjeux liés à l'environnement d'aujourd'hui et demain. Cette association avec la MAIF est top, il est essentiel pour moi de choisir des partenaires désireux de m'accompagner dans ma démarche environnementale active, allant au-delà de la simple sensibilisation.
En quoi vous rejoignez-vous le plus MAIF et vous sur cet engagement ?
Sur les actes, tout simplement. Dans ma vie personnelle, j'ai à cœur de mettre des choses en place pour minimiser mon impact et émettre moins de gaz à effet de serre. Et MAIF déploie aujourd'hui, à travers le dispositif MAIF Sport Planète, un ensemble d'actions tout au long de l'année, permettant de motiver le plus grand nombre de personnes et s'engager collectivement pour la préservation de la planète, comme des actions de plogging auprès des écoles par exemple. C'est ce passage à l'acte qui donne encore plus de sens à notre partenariat, et qui va plus loin que la prise de conscience que nous avons déjà.
Qu'est-ce qui vous tient le plus à cœur dans votre combat permanent pour l'environnement et sa protection ?
Le milieu naturel, c'est mon terrain de jeu, là où j'évolue au quotidien. Le changement de saison, par exemple, c'est époustouflant, magnifique, ça me procure du bonheur et de la joie. Et je me dis que je n'ai pas le droit dans mon activité quotidienne de détériorer un environnement qui me rend heureux. Je mets les choses en place pour que ceux qui arrivent derrière nous puissent à leur tour s'émerveiller devant cet environnement naturel. La société actuelle incite malheureusement à se déconnecter de ce milieu, et pourtant on ne peut pas vivre sans la nature. On doit faire en sorte de la préserver et d'avoir une réflexion et une conscience dans nos faits et gestes au quotidien pour ne pas perturber cet environnement fragile.
Vous avez la chance d'allier cet environnement naturel et le sport dans votre activité. Est-ce ça qui vous a amené à l'ultra-trail ?
Oui, complètement. La symbiose entre l'effort physique et la contemplation des beaux paysages, c'est un truc incroyable ! Et aussi cette notion d'aventure. Finalement, le déplacement en courant est assez faible au niveau de l'allure, donc on peut prendre le temps de voir pas mal de choses. À vélo, par exemple, comme on va plus vite, on peut louper des choses sympas à voir. Il y a aussi la simplicité de la discipline. C'est une paire de baskets, un short, et cette liberté que l'on peut avoir de parcourir des kilomètres dans de superbes environnements, c'est ce que j'aime par-dessus tout dans cette discipline !
Vous nous confirmez que vous serez de nouveau au départ de la prochaine édition de l'Ultra-Trail du Mont-Blanc, en 2022. Avec pour objectif de l'emporter pour une quatrième fois ?
Je vais tout faire pour être le mieux possible à cet UTMB 2022 et on verra à la fin le résultat. Après, je trouve un peu prétentieux de dire que je viens pour une quatrième victoire alors que l'on parle d'ultra-trail. Et en ultra-trail, il y a tellement d'obstacles et d'incertitudes que l'on ne sait jamais à quelle sauce on va être mangé ! C'est pour ça que cette discipline se détache un peu des autres... il n'y a pas forcément de vérité, à part s'entraîner pour arriver le mieux possible. Ça, c'est sûr, il ne faut pas être avare d'efforts (il rit). Je ferai du mieux possible avec la manière, en gérant mon allure et mon alimentation, et on verra derrière comment cela se retranscrit. J'ai hâte d'y être en tout cas !
« Quand on me met en avant, j'ai du mal »
L'année dernière, vous aviez jeté l'éponge en cours de route. Vous ne pouviez vraiment pas aller plus loin ?
Oui, c'était très compliqué. Au trentième kilomètre déjà, je voyais que ça n'allait pas. J'ai continué quand même pendant 25 bornes, dans la difficulté, mais ce n'était pas possible d'en faire davantage. Déjà parce que je n'avais pas de force, j'étais épuisé physiquement. Et parce que je n'éprouvais pas de plaisir. Et dans l'ultra-trail, si vous ne ressentez pas de plaisir dans l'effort, ce n'est pas la peine de continuer.
Dès le départ, votre préparation n'avait pas été optimale, donc cela semblait difficile, pour ne pas dire impossible, de performer dans ces conditions ?
Il est certain que ma préparation avait été biaisée. Je m'étais entraîné du mieux possible, mais je n'étais pas dans les meilleures conditions. Mais il y a tellement d'incertitudes dans un ultra que même si l'on est très bien préparé, on peut ne pas finir. Et à l'opposé, même en étant mal préparé, cela peut bien se passer si l'on est sur un bon jour. Il fallait tester, ce n'est pas passé, mais on va réessayer.
Qu'est-ce que ça représente pour vous de compter trois victoires dans l'Ultra-Trail du Mont-Blanc et de vous y être imposé dans les quatre courses individuelles ?
Un rêve ? Le massif et l'environnement autour du Mont-Blanc me font rêver, ça, c'est clair (rires). La course à pied est un sport que j'affectionne depuis mon enfance. Après, qu'est-ce que ça me fait ? Ça m'a permis de m'ouvrir des portes et de rencontrer des personnes formidables. Et j'affectionne particulièrement ce partage avec différentes personnes.
Qu'est ce qui est le plus compliqué dans votre discipline ?
Le fait que cela ne tienne pas à grand-chose finalement. Il faut mettre tout bout à bout : être bien physiquement, mentalement, bien avec son équipe. C'est un équilibre qui n'est pas si simple à trouver et quand on y arrive, c'est super ! Après, le plus compliqué pour moi, c'est peut-être la reconnaissance que l'on me donne. Je ne suis pas un solitaire, mais j'aime bien la tranquillité et le calme. Je suis un mec de l'extérieur et de la nature, et quand il y a trop de monde qui gravite autour de moi, je ne suis pas à l'aise. J'ai du mal à être mis en avant. Donc le plus dur, c'est peut-être ça... avoir un peu de notoriété à travers quelques performances, ce qui n'est pas du tout naturel chez moi !
Vous menez un combat contre la maladie de Lyme depuis plusieurs années. Où en êtes-vous et avez-vous enfin trouvé un traitement qui vous permette de vous exprimer pleinement de nouveau ?
Oui, j'ai rencontré un infectiologue très compétent dans la région de Bourg-en-Bresse qui prend en compte la chronicité de la maladie. Il m'a bien sorti la tête de l'eau, puisqu'aujourd'hui, j'arrive à m'entraîner de nouveau correctement et à faire de longues sorties. J'ai fait il y a quelques jours une sortie de 115km en ski de fond. C'est plutôt de bonne augure. De là à être performant sur un ultra, je ne sais pas encore, car je n'ai pas encore testé, mais les sensations sont quand même correctes. Le traitement antibiotique pour soigner la maladie a eu un effet bénéfique, mais comme il prend en compte la chronicité, c'était un peu plus long que préconisé (21 jours de traitement). Aujourd'hui, je vois clairement une différence. On va voir comment ça évolue. Je cours en ski de fond tous les week-ends pour parfaire la caisse (sic) et je vois comment je réagis au fil des compétitions. Et quand il s'agira de rechausser les baskets, je verrai où j'en suis.
« Quelque part, l'ultra-trail, c'est un acte révolutionnaire »
Vous devez déjà voir une sacrée différence ?
Oh oui, ça, c'est sûr ! Passer d'un stade où on n'arrive plus à courir à se réentraîner correctement, à refaire des bornes et à se refaire plaisir... La base est déjà là, donc c'est déjà une belle étape de franchie, et ça fait du bien au moral.
Avez-vous craint de devoir tout arrêter ?
Ce qui me faisait le plus peur, c'était de ne pas retrouver de sensations et une forme optimale pour avoir du plaisir et faire des sorties longues. Etre performant, c'est une chose, mais ce n'est pas l'essentiel. Je n'avais pas peur de ne plus être performant mais plutôt de ne plus pouvoir prendre du plaisir à l'entraînement à cause d'une fatigue chronique. Ça, ça me perturbait clairement. Aujourd'hui, la base est retrouvée. Les performances, c'est encore une autre chose, un autre palier à franchir. Mais il y a déjà la base, et c'est le principal.
Chez vous, c'est inné quelque part de courir sur de si longues distances ?
Oui, si l'occasion se présente, que j'ai du temps libre, qu'il y a une belle météo et que ça rentre dans le cadre de mon entraînement... Ça m'est arrivé deux-trois fois de faire 80 bornes pour aller voir mes beaux-parents en courant. Je suis aussi allé voir mon partenaire à Zurich en faisant 240 bornes en trois jours. Ça change un peu des parcours habituels. Au moins, on n'est pas obligé de prendre la voiture et on voit du pays, donc c'est tout bénef' (rires).
Est-ce que l'on peut dire que cela remonte à votre enfance ?
Oui. Disons que j'aime bien l'esprit d'aventure, de découverte. En plus, ça me permet de m'évader dans mes pensées, car je suis un peu philosophe (il rit). C'est vraiment ce qui me plaît dans la discipline et dans les sorties et les entraînements : cette liberté. J'affectionne de sortir des cadres structurés du sport, que l'on apprend à l'école ou en club. L'ultra, ça se détache un peu de tout ça, et n'est pas du tout en phase avec notre société actuelle à la recherche de l'effort minimal et du confort. C'est complètement en décalage. L'ultra, c'est quelque part un acte révolutionnaire !
Au point d'aller jusqu'à dire que quand vous croisez un lynx dans la nature, cela vaut toutes les victoires...
Oui, c'est incroyable ! Ca fait monter le palpitant car on est en train de vivre un truc magique et qu'il faut réussir à apprécier le moment. Ce sont des choses comme ça qui restent éternellement dans la tête. Ce sont des moments forts. Qu'est-ce qui est le plus fort entre croiser un lynx ou gagner un UTMB ? Je ne sais pas. Ce sont deux choses différentes. Des choses de la vie à prendre en compte et à apprécier.