Yohann Diniz et les Jeux, une histoire contrariée

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Benoît Conta, Media365 : publié le vendredi 06 août 2021 à 08h47

Champion du monde et d'Europe, Yohann Diniz n'aura jamais réussi à briller lors des Jeux Olympiques.

2008, un abandon pour commencer

Vice-champion du monde en titre, Yohann Diniz, 30 ans, s'avance à Pékin avec un gros espoir de première médaille olympique, lui qui n'avait pas été retenu quatre ans plus tôt, à Athènes. S'il démarre fort pour suivre Alex Schwarzer, le futur médaillé d'or, l'illusion ne dure pas, et le Français craque peu à peu après une heure de course, pour finalement jeter l'éponge un peu après 30km, dans la moiteur pékinoise. « J'ai eu mal au ventre. Après j'ai eu un coup de chaud et enfin j'ai eu mal aux ischios. Au fur et à mesure je dépérissais. C'était un jour sans, un jour olympique », déclare alors Diniz. Pour ses coaches, la réponse est ailleurs. « A mon avis la pression était trop forte, analyse Denis Toutain, l'un de ses deux entraineurs. Il a dit lui-même qu'il ne pouvait pas aller devant, mais ce n'est pas un problème physique, mais plus psychologique. Il avait fait tout ce qu'il fallait pour être prêt. Il avait trop de pression. Il y a deux ans, il n'en avait pas du tout et l'an dernier il en avait beaucoup moins », explique alors Denis Toutain. 

2012, une disqualification rocambolesque

Cette fois, Yohann Diniz semble dans le coup, puisqu'il suit le rythme des favoris pendant plus de 30 kilomètres. C'est finalement au 35e que tout se joue, lorsque le Rémois ne parvient pas à suivre l'accélération posée par les leaders. Au 37e, au passage en zone de ravitaillement, le Tricolore n'est plus lucide, et en écoutant, et surtout en regardant (ce qu'il ne fait pas d'ordinaire), son coach qui lui donne ses consignes, il se prend les pieds dans la barrière, et chute. Dans la foulée, il s'asperge avec plusieurs bouteilles d'eau, pour finir la course à la 8e place. C'est finalement en zone mixte, au contact des journalistes, que Diniz, que ses coaches n'ont pas prévenu, apprend sa disqualification pour « ravitaillement hors zone », alors même que les juges reconnaissent qu'il n'a pas bu les fameuses bouteilles. Mais ce rafraîchissement est bien illicite. « On l'a appris à l'arrivée. Il était déjà en détresse, on a rien dit », souffle l'un de ses coaches. Pour Diniz, le choc est rude, mais le marcheur n'a pas de regret sur sa chute, il n'aurait pas eu les jambes d'aller chercher la médaille. « «Je suis tombé sur plus fort que moi », reconnaît-il.

2016, l'enfer de Rio

Longtemps,  à Rio, Yohann Diniz a semblé avoir les jambes pour casser la malédiction. C'était sans compter sur de terribles problèmes gastriques. Des soucis qui l'ont forcé à s'arrêter pour se soulager, l'empêchant de défendre ses chances jusqu'au bout, le Rémois s'effondrant même à 15 kilomètres de l'arrivée, avant de repartir, héroïque. Il finit finalement sa course à la 8e place, alors qu'il semble ne plus avoir une once de lucidité « J'ai tout de suite eu des gros soucis au niveau gastrique dès le dixième kilomètre. Ça s'est vite transformé en saignements à partir du 12e, puis au 15e, 20e, 25e. Forcément, ça te pompe de l'énergie, glissera le malheureux, le lendemain. Après, je crois que je suis tombé, des gens ont voulu que je m'arrête, je ne me suis pas arrêté. On m'a aidé à me relever, je ne m'en souviens même pas. » De ce douloureux épisode, le Français préfère garder le meilleur, et ce premier, et finalement seul, classement olympique. « Franchement, je ne suis pas déçu. Je suis satisfait de ce que j'ai fait. Je me suis battu. Je suis allé au bout de ce que je pouvais donner, conclut-il. Je suis au moins finaliste, ça reste. On ne me l'enlèvera pas. Pour une fois, je serai classé aux Jeux olympiques. »

 2021, "la course de trop"

A 43 ans, Yohann Diniz sait qu'il dispute ses derniers Jeux Olympiques, et n'a pas abandonné ses rêves de médaille. Contraint de s'arrêter pour de nouveaux problèmes gastriques dès le 5e kilomètre, le vétéran revient ensuite peu à peu sur le peloton de tête. Mais c'est peine perdue, et l'éponge est jetée au 29e kilomètre. « J'ai vite senti que je n'avais pas de bonnes jambes, j'étais fatigué. Mal à l'adducteur, mal au dos, pas de bonnes sensations. J'avais du mal avec ma respiration. En gros, c'était la compétition de trop, explique-t-il à L'Equipe. Je n'étais pas en capacité de finir l'épreuve. Physiquement, je la subissais. Je me suis préparé, je ne sentais pas plus que ça la chaleur et l'humidité. Tout fonctionnait pas mal. Mais physiquement, mon corps ne répondait pas. » De quoi laisser un petit goût amer à celui qui va désormais tirer sa révérence. « Les rabat-joie vont pouvoir s'amuser... Je suis déçu de cette fin mais franchement, je n'avais pas les armes, c'était la course de trop, conclut-il. Je n'ai pas su dire stop à temps. C'est dommage. Ça fait partie de mon personnage, ça fait partie de moi. Maintenant, on va penser à récupérer un peu. Et à la suite de ma reconversion, de ma retraite sportive. »

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