Grand Chelem 1969 : Laver, une symphonie inégalée

Grand Chelem 1969 : Laver, une symphonie inégalée©Media365

Thomas Siniecki, Media365 : publié le mardi 07 septembre 2021 à 18h06

Novak Djokovic peut devenir, après Rod Laver, le deuxième joueur de l'histoire à réussir le Grand Chelem. L'occasion de revenir sur cette année 1969 exceptionnelle de l'Australien, qui avait accompli son oeuvre à l'âge de 31 ans.



Open d'Australie

La première saison complète de l'ère Open débute en janvier 1969. Le tournoi du Grand Chelem australien se déroule alors à Brisbane et sur gazon (Melbourne n'arrivera qu'en 1988). Après 135 titres déjà acquis - 53 en amateur de 1956 à 1962, puis 72 en professionnel de 1963 à 1968, et déjà dix supplémentaires depuis le basculement dans cette ère Open six mois plus tôt -, la légende de Rockhampton débute son année historique en décrochant le huitième de ses onze titres du Grand Chelem. L'Espagnol Andrés Gimeno, spécialiste de terre battue, est logiquement avalé en trois manches (6-3, 6-4, 7-5).

Privé des quatre tournois majeurs de 1963 à 1967, puisque les professionnels en étaient alors exclus, Rod Laver réussit un retour fracassant à ce niveau. Atteignant la finale de Roland-Garros l'année précédente, pour la première levée du Grand Chelem de l'ère Open, il avait enchaîné avec une victoire à Wimbledon face à son compatriote Tony Roche. Son accroc à l'US Open, une élimination en huitièmes face au Sud-Africain Cliff Drysdale, est ainsi rattrapé avec la manière. Le chef-d'oeuvre de son Open d'Australie restera effectué en demi-finales, avec une victoire contre Roche 22-20 au cinquième set.

Roland-Garros

A Paris, c'est le remake de l'édition 1968, celle qui représentait donc le premier tournoi du Grand Chelem de l'ère Open : Rod Laver retrouve son compatriote Ken Rosewall, vainqueur l'année passée, est balayé en trois petits sets (6-4, 6-3, 6-4). "Il avait beaucoup de puissance et de variation, alors que mon jeu était plus consistent", se souvient Rosewall (interrogé pour le Hall of Fame). Rod Laver, lui, se demandait alors comment se défaire de son ami... "Je me suis dit qu'il fallait juste, peut-être, que je tape la balle un peu plus fort, mettre un peu plus d'effet. Et j'ai probablement joué le meilleur tennis de ma carrière sur terre."

Profiter de ses armes au mieux, en essayant de ne penser qu'à la victoire : même 50 ans plus tard, en 2019, Rod Laver n'a pas d'autre recette à donner. Du haut de son 1,73 m, le gaucher australien continue d'écrire son histoire en apportant un rythme vivifiant. Et comme à Brisbane, c'est lors d'un tour précédent que Rod Laver a été largement plus poussé dans ses retranchements : au deuxième tour, il était en effet mené deux sets à zéro par Dick Crealy avant de renverser la situation (3-6, 7-9, 6-2, 6-2, 6-4). Sur deux jours, après l'arrêt du match à la fin de la troisième manche à cause de la nuit.


Wimbledon

Décidément long à l'allumage, Rod Laver est à nouveau mené de deux manches au deuxième tour sur le mythique gazon londonien, seul des quatre tournois du Grand Chelem où il se présente en tant que tenant du titre. L'Indien Premjit Lall subit le réveil spectaculaire du n°1 mondial, qui s'impose finalement avec deux roues de bicyclette pour conclure (3-6, 4-6, 6-3, 6-0, 6-0). En huitièmes de finale, contre l'Américain Stan Smith, il est cette fois rejoint à deux sets partout avant de l'emporter (6-4, 6-2, 7-9, 3-6, 6-3).

En finale contre John Newcombe, un des nombreux autres Australiens à écumer le circuit au plus haut niveau, Rod Laver est encore programmé en mode machine, même s'il lâche un set (6-4, 5-7, 6-4, 6-4). "Je savais que ce serait un match difficile, il savait comment m'affronter. Les choses ont changé après une première manche plutôt facile. Il a commencé à mettre la balle plus basse sur ma volée de coup droit. Il lançait aussi quelques lobs, et avec nos petites têtes de raquette, c'était préférable de laisser rebondir pour ne pas commettre d'erreur." Une autre époque.

US Open

Rod Laver se présente à New York dans la même configuration que Novak Djokovic, celle qui n'était jamais arrivée en plus de 50 années : être en position de réaliser le si convoité Grand Chelem, celui qu'il avait déjà réussi en 1962 en tant qu'amateur. Comme chez lui, en Australie, le tournoi a encore lieu sur gazon, en l'occurrence à Forrest Hills (près de Flushing Meadows, qui ne récupérera le tournoi qu'en 1977). Les ennuis s'enclenchent une nouvelle fois bien avant la finale. En huitièmes, l'Américain Dennis Ralston mène ainsi deux manches à une.

Bénéficiant d'une pause salvatrice à l'issue du troisième set, il repousse inexorablement la défaite (6-4, 4-6, 4-6, 6-2, 6-3). Son quart de finale n'est pas de tout repos non plus, 4-6, 8-6, 13-11, 6-4 contre Roy Emerson, encore un compatriote et ami. En finale, Roche est sa dernière victime, avec un jour de décalage à cause de la pluie. Sur le même type de scénario, il gagne en quatre sets après avoir concédé le premier : 5-7, 6-1, 6-2, 6-2. "Dans mon euphorie, j'ai oublié ma dignité et j'ai sauté par-dessus le filet, ce que j'ai regretté. Afficher sa joie ainsi, ça ne se fait pas." Que ferait "Djoko" à sa place ?

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