Mondiaux 2017 : Pierre-Ambroise Bosse au sommet après un incroyable final

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Emmanuel LANGELLIER, Media365 : publié le vendredi 05 juin 2020 à 15h49

Pierre-Ambroise Bosse avait signé une fin de course insensée pour rafler le titre de champion du monde du 800 mètres à Londres en 2017. Retour sur ce chouette moment du sport français.

Ce mardi 8 août 2017, Pierre-Ambroise Bosse est loin d'être encore PAB. Pas seulement le « PAB » pour les intimes mais le PAB pour tout le monde après s'être révélé au monde entier. Au départ de la finale du 800 mètres des Mondiaux d'athlétisme de Londres, le Français ne fait pourtant pas partie des favoris au titre. Bosse n'a pas la faveur des bookmakers mais il va somptueusement déjouer tous les pronostics...

Sa saison est jusque-là assez compliquée. Bosse, l'original à l'humour décalé, n'est pas épargné par les blessures. Son début d'année est retardé en raison d'un décollement de l'aponévrose au grand fessier. Puis il réussit quand même à décrocher son billet pour les Championnats du monde sur le fil, lors de sa dernière chance au Meeting Herculis de Monaco avec un chrono de 1'44''72. C'est ric-rac mais ça passe. Sa préparation ensuite perturbée par une lésion aux ischio-jambiers, il confie vivre un « calvaire ». Alors, il aborde la finale des Mondiaux sur la pointe des pieds.

Repêché au temps en demi-finales du 800m du championnat du monde

Comme première étape, il a passé les séries sans encombre en se classant deuxième de sa course en 1'47''25. La finale ? Il aurait pu la rater en réalité... Car il finit troisième en demi-finale. Mais il est repêché au temps (1'45''63) ! Ouf. Le voici en lice pour tenter de devenir le premier champion du monde français sur 800 mètres. Eh oui, cela n'a jamais été fait auparavant par un athlète tricolore.

Pierre-Ambroise Bosse est également en course pour rejoindre une catégorie rare : celle des champions du monde français d'athlétisme. Toutes épreuves confondues, ils ne sont que dix au matin de ce 8 août 2017 à avoir raflé l'or aux Mondiaux : Marie-José Pérec (400 mètres en 1991 et 1995), Stéphane Diagana (400 mètres haies en 1997), Eunice Barber (heptathlon en 1999 et longueur en 2003), le 4x100 mètres femmes (2003), le 4x400 mètres hommes (2003), le 4x100 mètres hommes (2005), Ladji Doucouré (110 mètres haies en 2005) et Teddy Tamgho (triple saut en 2013).

PAB produit son effort de course à 300 mètres de l'arrivée pour espérer un podium

Bon vivant et bon client pour les médias, Bosse s'avère facétieux. Mais aussi travailleur. « Il faut souffrir encore plus qu'eux parce que je suis peut-être moins doué qu'eux. Mais avec le travail accumulé, ça finira par payer. Il y aura des déclics », livre le Français, originaire du bassin d'Arcachon, dans les semaines précédant la compétition majeure. Celui qui a échoué au pied du podium aux Jeux Olympiques de Rio de Janeiro après avoir battu le record de France du 800 m en 2014 croit en sa bonne étoile. Et il a raison.

A la moitié de la finale débutée à 22h35, personne n'imagine néanmoins un seul instant le Français tout en haut du podium. Après un premier tour rapide (50''76) mené par McBride dans le stade olympique londonien, Bosse est sixième. Dans la ligne droite opposée, à 300 mètres de l'arrivée, PAB va alors produire son effort. Tel Marc Raquil qui avait arraché le bronze en 2003, Bosse tente un osé pari. Très osé. Et il accélère. Il part très tôt à l'attaque. A l'assaut !

Bosse résiste à tout le monde et devient champion du monde, un résultat dans l'histoire de l'athlétisme français

Le roi de la discipline, David Rudisha, n'est pas là (forfait). Bosse va en profiter et déposer tous les favoris. Le coup de poker va se transformer en coup de maître. Le Français, champion d'Europe Espoirs de la distance, déboite sur la droite. Il fait l'extérieur et va dépasser un à un les cinq concurrents placés devant lui. L'exploit qui paraissait impossible prend une tout autre tournure. PAB déploie sa longue foulée, se porte en tête à l'attaque du dernier virage. Encore faut-il résister car il a démarré tôt.

Il faut gérer les talents de sprinteur du Polonais Adam Kszczot et la foulée du Kenyan Kipyegon Bett. Bosse, encouragé par les perchistes Renaud Lavillenie et Axel Chapelle dans le virage, va remarquablement accéder à ces souhaits. Le public français est en haleine devant sa TV, Patrick Montel est lui en transe aux commentaires sur France 2. L'athlète tricolore se détache et va conserver son avance jusqu'au bout. Incrédule, il franchit la ligne d'arrivée en tête en 1'44''67 et décroche la médaille d'or. « Moi ? Champion du monde ? », semble-t-il se demander en se pointant lui-même du doigt. Oui, c'est bien lui le onzième champion du monde de l'histoire de l'athlétisme français !

Bosse à son entraîneur : « Je vais te faire un tour de magie ce soir »

A 25 ans, PAB décroche la timbale. « Je ne l'explique pas. Pendant la course, j'ai eu l'impression d'être un gamin de 15 ans, avec plus d'envie de panache que de performance, lâche-t-il. Dans la dernière ligne droite, je vivais un rêve. Ils étaient tous derrière moi. Quand j'ai passé la ligne, je n'y croyais pas. Je me disais : "Ce n'est pas moi." J'ai fait un tour du monde, pas un tour d'honneur. » Amoindri par sa douleur à l'ischio et avec seulement trois courses à son actif avant les Mondiaux, Bosse triomphe.

C'est même un tour de magie qu'il a sorti de sa boite. « C'est extraordinaire, s'écrie son entraîneur, Alain Lignier. Il m'avait dit : "Je vais te faire un tour de magie ce soir". Il y a deux mois jour pour jour, il reprenait l'entraînement après deux semaines d'arrêt, il m'avait dit : "Ça va être juste pour faire bonne figure aux Mondiaux". Et là il a montré qu'il était plus grand, champion du monde. » Sacré lors de la journée internationale du chat, Pierre-Ambroise Bosse n'en oublie évidemment pas son Rab's. « On embrasse mon chat qui doit être en train de faire ses griffes à la maison, ça doit être chaud pour lui », balance ce drôle d'asticot que l'Hexagone se met à apprécier.

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