Dopage : Le recours aux produits dopants était un passage obligé pour Johan Bruyneel

Dopage : Le recours aux produits dopants était un passage obligé pour Johan Bruyneel©Media365

Mathieu WARNIER, Media365, publié le samedi 13 novembre 2021 à 10h30

Dans un entretien accordé à la presse belge, l'ancien directeur sportif de Lance Armstrong, Johan Bruyneel, est revenu sur la culture du dopage à son époque et assure que les mentalités changent dans le peloton.

Johan Bruyneel s'exprime désormais sans filtre. Directeur sportif des équipes US Postal puis Discovery menées par Lance Armstrong dans les années 1990 et 2000, l'ancien coureur belge a livré un témoignage fort dans les colonnes du magazine sportif belge Eddy sur le dopage au cœur du peloton à cette époque. Désormais banni à vie du cyclisme pour sa participation au scandale de dopage autour de l'ancien coureur américain, Johan Bruyneel a assuré que le dopage était alors un passage obligé pour exister. « Propre, tu ne peux pas battre les autres favoris lorsqu'ils sont dopés, a-t-il déclaré. Le dopage, à l'époque, c'était l'une des règles du jeu, sauf qu'elle n'était pas écrite. » Assurant qu'il y avait le risque que tout soit étalé sur la place publique, le natif d'Iseghem ne s'imaginait pas être au cœur d'un « tel acharnement ». « A un moment donné, il fallait une personne d'une certaine célébrité pour servir d'exemple, pour être sacrifiée, et Lance Armstrong était la cible idéale », a-t-il confié.

Bruyneel : « Soit tu t'adaptes et tu te dopes, soit tu disparais »

Coureur entre 1987 et 1998, avant sa reconversion comme directeur sportif, Johan Bruyneel a été un témoin de l'évolution du dopage à l'EPO dans le cyclisme. A ses yeux, le recours à un tel produit était inévitable. « Moi j'ai connu l'avant-EPO et l'EPO, et dans un cas comme dans l'autre il n'y avait pas le choix, a-t-il assuré. Déjà, quand tu arrives chez les professionnels, tu intègres un monde qui te met très vite face à un dilemme : soit tu t'adaptes et tu te dopes, soit tu disparais. » Des pratiques interdites qui, selon Johan Bruyneel, étaient faites au vu et au su d'autorités sportives rapidement dépassées. « Bien sûr que les dirigeants de l'UCI savaient. Mais ils ont fait tout ce qui était en leur pouvoir, ajoute l'ancien dirigeant. Il n'existait pas de méthode clinique pour détecter l'EPO, ils ont donc instauré la règle de l'hématocrite limité à 50 % ce qui prouve qu'ils étaient au courant que le produit dopant circulait. Après ça, c'étaient les transfusions sanguines, indétectables. Alors comment faire ? »

Bruyneel : « J'observe un changement de mentalité »

Au-delà de la sphère sportive, Johan Bruyneel s'est aussi montré critique face à une sphère médiatique qui n'était pas dupe de l'utilisation de produits dopants à cette époque mais qui, à ses yeux, n'a pas suffisamment réagi. « Tous les journalistes savaient. Quelques-uns se sont lâchés. Mais tous les autres, ils se taisaient, affirme l'ancien coureur belge. Ils ne voulaient pas salir le sport qu'ils couvraient, ils avaient trop peur de perdre de l'audience. » Toutefois, en conclusion de cet entretien, Johan Bruyneel voit une lueur d'espoir pour l'avenir du cyclisme. « J'observe un changement de mentalité. Les jeunes, aujourd'hui, il ne faut même pas leur parler de dopage, assure-t-il. Ça n'entre pas dans leur raisonnement, c'est complètement étranger à leur culture. Même les vitamines, c'est déjà limite. » Mais les doutes liés à l'encadrement de certaines équipes, notamment Bahrain Victorious mais également UAE Team Emirates, pourraient faire ressurgir le spectre du dopage.

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